Lors de la séance du 10 mai 1967 du Séminaire XIV, Logique du
fantasme, Lacan affirme : « quand on sera revenu à une saine perception
de ce que Freud nous a découvert, on dira peut-être – je ne dis pas, la
politique, c’est l’inconscient, mais simplement – l’inconscient, c’est la politique
[…]. Je m’en tiendrai simplement à dire que ce qui lie les hommes entre
eux, comme ce qui les oppose, est à motiver précisément de ce dont nous
essayons d’articuler pour l’instant la logique, à savoir, le fantasme ». Il
ne s’agit pas de soutenir ici que la politique soit mue par des motivations inconscientes, libidinales ou pré-rationnelles (comme le soutient
une grande partie de tradition freudo-marxiste), mais que l’inconscient
lui-même se situe structurellement dans un registre trans-individuel dans
lequel l’imaginaire et le symbolique, tout comme le recouvrement du
Réel, sont médiés et organisés ensemble, dans un espace en même temps
collectif et individuel (voire dans une zone grise entre les deux).
Ceci va à l’encontre d’une idée, fort répandue à gauche, selon laquelle la
psychanalyse ne serait qu’une pratique individuelle limitée à l’espace privé,
concernant des personnes singulières qui se rendent chez l’analyste. Si tel
était le cas, il faudrait en conclure que l’espace public ne serait rien d’autre
qu’un agrégat d’espaces privés, et que la seule relation entre l’inconscient
et la dimension collective tiendrait au fait d’aller tous, individuellement,
en analyse. Mais est-il vraiment possible de soutenir que l’expérience
de l’inconscient se réduit à une expérience privée …
Mots-clés éditeurs : antagonisme, hégémonie, inconscient capitaliste, lacano-marxisme, politique de la psychanalyse
Date de mise en ligne : 05/05/2025
https://doi.org/10.3917/amx.077.0011