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Magistrats mis en cause par Eric Dupond-Moretti : l’Etat condamné pour faute

Le tribunal administratif de Paris a ordonné à l’Etat de verser 15 000 euros à Ulrika Delaunay-Weiss et 12 000 euros à Patrice Amar pour atteinte à leur réputation, dans l’affaire qui avait valu un procès inédit à l’ex-ministre de la justice.

Le Monde avec AFP

Publié aujourd’hui à 12h43, modifié à 14h46

Temps de Lecture 2 min.

Le tribunal administratif de Paris a estimé, jeudi 16 janvier, que l’Etat avait « commis une faute engageant sa responsabilité en mettant en cause publiquement » deux magistrats du Parquet national financier (PNF) en 2020, dans l’affaire qui avait valu un procès inédit à l’ex-ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti. Jugé par la Cour de justice de la République (CJR) pour prise illégale d’intérêt dans cette affaire en novembre 2023, l’ancien ministre avait, lui, été relaxé.

Le tribunal administratif a condamné l’Etat à verser 15 000 euros à Ulrika Delaunay-Weiss et 12 000 euros à Patrice Amar. Ils font partie des trois magistrats du Parquet national financier contre lesquels l’ancien ministre avait ouvert des enquêtes administratives, alors qu’il avait eu des différends avec eux quand il était avocat. Les trois magistrats (la cheffe du PNF, Eliane Houlette, était également visée) avaient finalement été blanchis de toute faute disciplinaire.

Les deux magistrats avaient « été publiquement mis en cause, d’une part, par un communiqué de presse du ministère de la justice les désignant nominativement et, d’autre part, par le biais de propos publics tenus par le ministre de la justice en exercice mettant en cause leur éthique professionnelle », note le tribunal dans son communiqué. « Ces deux magistrats ont demandé au tribunal de condamner l’Etat à les indemniser des préjudices subis à la suite de cette mise en cause publique, estimant notamment qu’elle portait atteinte à leur réputation professionnelle et à leur honneur », souligne-t-il.

L’ex-ministre relaxé faute d’élément « intentionnel »

Dans sa décision, le tribunal relève que les propos publics en question « étaient matériellement inexacts » et qu’ils ont « porté atteinte à la réputation professionnelle des intéressés » et étaient donc « constitutifs d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat ». Au cours du procès, les deux magistrats avaient décrit l’impact de ces déclarations sur leur vie personnelle et professionnelle. « On livre nos trois noms à la presse, c’est un immeuble qui s’effondre sur ma tête », « pendant des semaines j’étais incapable de faire quoi que ce soit. J’étais comme un zombie », s’était remémoré Ulrika Delaunay-Weiss. « Le ministre a vengé l’avocat », avait-elle conclu.

« Plus de quatre ans après les faits, une décision de justice sanctionne enfin les graves fautes commises par Eric Dupond-Moretti », s’est réjouie Me Marie Lhéritier, avocate des deux magistrats « dans le viseur » du garde des sceaux. La décision du tribunal administratif « tiendra donc lieu de lettre d’excuses d’Eric Dupond-Moretti », a-t-elle ajouté. Sollicité, le ministère de la justice n’a pour l’heure pas réagi.

Dans une décision inhabituelle en matière de prise illégale d’intérêts, la CJR (composée de magistrats professionnels et de parlementaires) avait estimé qu’Eric Dupond-Moretti s’était bien placé en situation de conflit d’intérêts, mais qu’il ne pouvait être reconnu coupable faute d’élément « intentionnel ». En juin 2020, alors qu’Eric Dupond-Moretti était encore avocat, on avait appris que le PNF avait fait éplucher ses factures téléphoniques détaillées (fadettes) et celles d’autres avocats, pour tenter de débusquer une éventuelle taupe qui aurait informé l’ex-président Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog qu’ils étaient sur écoute dans l’affaire de corruption dite « des écoutes ». Eric Dupond-Moretti avait dénoncé une « enquête barbouzarde », un basculement dans « la République des juges », et porté plainte.

Face à l’« émoi », la ministre de la justice d’alors, Nicole Belloubet, avait lancé une « inspection de fonctionnement » sur l’enquête du PNF. Entre-temps, en juillet 2020 et à la surprise générale, Eric Dupond-Moretti avait été nommé ministre de la justice. Malgré les alertes d’un risque « évident » de conflit d’intérêts émises par les syndicats de magistrats, c’est lui qui avait reçu les conclusions de l’inspection. Le rapport ne pointait aucune faute disciplinaire mais le ministre, sur « recommandation » de son administration, avait ordonné une enquête administrative pour rechercher d’éventuels manquements individuels des trois magistrats.

Le Monde avec AFP

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