ILE DE FRANCE La mort d'un chêne de la forêt de Fontainebleau Jupiter décapité

Agé d'environ six cent cinquante ans, d'après les archives conservées par l'administration forestière, le chêne Jupiter dominait la forêt de Fontainebleau de sa masse impressionnante. Les forestiers le protégeaient amoureusement, comme un témoin vivant de leur gestion à long terme. Et les promeneurs venaient contempler avec respect le doyen de cette forêt, devenue aujourd'hui un vaste parc de loisirs pour les Franciliens.

Mais l'ancêtre souffrait de son grand âge et, sans doute achevé par quatre années consécutives de sécheresse, il a fini par rendre l'âme pendant l'été 1993. Pris de court, les agents de l'Office national des forêts (ONF) ont tenté de sauver ce qui pouvait encore l'être en prélevant des greffons sur le géant, afin de produire in vitro des rejetons d'un spécimen à la longévité exceptionnelle. Trop tard, hélas ! Lorsque, le 11 avril, l'entreprise d'élagage dresse sa grue pour prélever des extrémités de branche, il faut se rendre à l'évidence : aucune montée de sève n'a eu lieu. L'arbre est mort de pied en cap.

Tollé général

C'est alors qu'est commis l'acte que beaucoup, aujourd'hui, considèrent comme une erreur irréparable. Constatant que les branches maîtresses sont non seulement mortes mais souvent pourries de l'intérieur, et profitant de ce que la grue des élagueurs est en place, l'ONF fait couper toutes les extrémités de branches de l'arbre " afin d'assurer la sécurité du public ". Le vieux chêne dresse donc aujourd'hui une cime réduite à l'état de chandelier. Jupiter, gloire de la forêt de Fontainebleau, a été fait manchot sur son cadavre.

Cette opération, aussitôt connue, suscite un tollé général parmi les amoureux de la forêt de Fontainebleau. "L'ONF m'a tuer ", écrit le président du comité pour le parc national de Fontainebleau, Samuel Baunée, usant d'une formule inaugurée par André Rousselet dans une tribune publiée dans le Monde. " On ne nous a même pas consultés alors que le massif est un site classé ", se plaint Louis Prieur, architecte membre de la commission départementale des sites.

Il vous reste 47.35% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.