Imagerie 3D : Visible Patient, une start-up française à la pointe de l’innovation chirurgicale
PROGRÈS. Grâce à l’Ircad, l’Institut de recherche en chirurgie basé à Strasbourg, les techniques chirurgicales alliant la robotique et l’imagerie ont métamorphosé l’acte opératoire. Illustration avec la start-up Visible Patient, récemment développée par l’établissement.
Créé en 1994 par le professeur de chirurgie Jacques Marescaux, l’Institut de recherche en chirurgie (Ircad) a récemment développé la start-up Visible Patient, qui transforme radicalement la manière dont le chirurgien se prépare à opérer un patient. Pour comprendre la maladie qu’il va prendre en charge, le chirurgien se fondait jusqu’à présent sur des images de l’organe en deux dimensions, produites par le scanner ou l’IRM.
Grâce à un algorithme de réalité virtuelle, Visible Patient est désormais capable de reconstruire ces images pour les transformer en images 3D et aboutir à un clone digital de l’organe à opérer, où apparaissent en couleurs les artères, les veines, les organes, les tumeurs… Un moyen de parfaitement comprendre la maladie : jusqu’où elle s’étend, par où passer pour l’atteindre et la retirer, avec le minimum de dommages collatéraux et des suites opératoires beaucoup plus simples. « Désormais, 75 % des interventions du poumon sont préalablement modélisées en 3D par Visible Patient », se réjouit le professeur Luc Soler, président de Visible Patient, qui fournit désormais ses « clones » au monde entier.
Une offre tout sauf virtuelle
Le chirurgien peut également intervenir sur ce clone digital, s’entraîner à l’opérer et refaire virtuellement l’intervention autant de fois que nécessaire. Avant d’aller au bloc, il a donc déjà acquis une maîtrise de l’intervention et peut la réaliser en toute sécurité. « De la même façon que les pilotes préparent longuement leur plan de vol avant de décoller, plus le chirurgien prépare l’intervention chirurgicale, meilleur sera le résultat », souligne le professeur Marescaux.
« Grâce à ces images virtuelles, nous sommes plus précis, nous retirons moins de poumon sain, et les patients ont une meilleure récupération après l’opération »
Outre l’aide dans la préparation du geste, la cartographie 3D accompagne le chirurgien jusqu’en salle d’opération et le guide pendant l’intervention. Agathe Seguin-Givelet, chef de service de chirurgie thoracique à l’Institut mutualiste Montsouris, à Paris, travaille depuis quelques années avec ces reconstructions virtuelles avant d’opérer les cancers du poumon : « Aucun patient ne ressemble à un autre, sur le plan anatomique. Grâce à ces images virtuelles, nous sommes plus précis, nous retirons moins de poumon sain, et les patients ont une meilleure récupération après l’opération. Pour certaines interventions, les instances européennes recommandent d’ailleurs de recourir à ces reconstructions virtuelles. » Le clone virtuel est du reste pris en charge par 80 % des mutuelles. Et le nombre de chirurgiens quiy ont recours, en particulier pour les interventions les plus complexes, s’accroît.
« Notre but ultime, c’est la chirurgie robotique. En clair, le chirurgien réalisera l’intervention sur le clone digital du patient, avec un droit à l’erreur. Lorsque le geste chirurgical sur le clone digital sera parfait, il sera enregistré, et c’est le robot qui effectuera ce geste à la place du chirurgien, expose le professeur Marescaux. L’automatisation est l’avenir de la chirurgie, comme c’est déjà le cas pour la voiture ou l’avion. Le chirurgien pourra opérer l’organe virtuel étape par étape, sauvegarder celle dont il est satisfait et supprimer les autres. Ensuite, un montage de chaque séquence sera effectué jusqu’à ce que l’opération idéale soit intégrée dans le robot. Le chirurgien supervisera alors l’opération réalisée par le robot et prendra la main si besoin, comme un commandant de bord d’un avion en pilotage automatique. »
Exactement ce qu’avaient perçu les chirurgiens qui ont imaginé et développé l’Ircad, cet institut de recherche privé à but non lucratif hébergé par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg. Ils pensaient en effet que l’avenir de la chirurgie résidait dans l’alliance de leurs gestes, des prouesses de l’imagerie médicale et des technologies digitales.
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