Japon : le point sur la situation électronucléaire

A Fukushima-Daiichi, des réactions s’enchaînent

Tandis que le 4 septembre vers 11h, un nuage de vapeur et / ou de gaz s’échappait de ce que notre ami et collègue Pierre Fetet pense être l’une des cheminées de dégazage de la piscine électronucléaire commune, deux autres événements se produisaient quasiment simultanément :

- Le même jour à la même heure (10h30) Tepco révélait que des concentrations élevées de Krypton-85 et d’hydrogène avaient été repérées au niveau de la salle de la chambre de suppression de l’ex-unité n°. 1

Japon : le point sur la situation électronucléaire

- Le même jour à la même heure, fukushima-diary reportait une élévation importante de la température sur l’un des rares thermocouples restant opérationnels au niveau de la cuve de l’ex-réacteur n°. 2. Si notre interprétation du document ci-dessous est correcte, il ne resterait plus qu’un seul point de mesure de température opérationnel sur les 9 situés en bas de la cuve réacteur (RPV).

L’électronucléaire Japonais, source confirmée de ressources atomiques militaires

Ce qui ressemble désormais à un secret de polichinelle a été une nouvelle fois évoqué par Satoshi Morimoto, ministre Japonais de la défense : le programme civil Japonais est également un piédestal logistique pour la réalisation rapide d’une arme militaire utilisable en cas d’agression étrangère.

« Le Japon peut rapidement fabriquer des bombes atomiques s’il le souhaite. »

 

Le Japon est depuis longtemps localisé en zone atomique « grise » (1), tout comme Israël, la Corée du Nord ou encore … l’Allemagne et cette nouvelle déclaration n’est pas faite pour rassurer les observateurs qui estimaient encore que le nucléaire avait définitivement coupé le cordon ombilical avec l’atome militaire.

A tel point que le parlement Japonais a voté en juin – et en toute discrétion – une modification de la loi sur l’énergie indiquant que le nucléaire civil est devenu officiellement « une industrie contribuant à la sécurité nationale du pays ». Autant pour les programmes de désarmement atomique, qui ne concernent décidément qu’une poignée de pays sans grands enjeux géostratégiques…

Le Japon pourrait ainsi, d’après le JP Times, sélectionner l’option 25% (2) à l’horizon 2030 pour ne pas compromettre définitivement la possibilité d’une orientation atomique. L’électronucléaire conditionne donc toujours les enjeux de pouvoirs et de dominations contrairement à ceux qui professent – la main sur le cœur – que les ponts séparant un réacteur et une bombe sont coupés depuis longtemps…

Le village de Rokkasho ne veut pas devenir une poubelle nucléaire éternelle

Kyodo News nous apprend enfin que la municipalité de Rokkasho (3), qui abrite le décidément improbable centre de retraitement de combustible nucléaire Japonais refuse de terminer en centre de stockage éternel de détritus nucléaires.

Après que les centrifugeuses Japonaise, déficientes, se soient arrêtées l’une après l’autre, la future usine de retraitement, fabriquée sous licence AREVA depuis 1993 (4) devait être opérationnelle en 2008 mais de nombreux ennuis techniques ainsi qu’une forte mobilisation anti-nucléaire ont retardé sa mise en service officielle.

La commission Japonaise sur l’énergie nucléaire (JAEC) ayant récemment déclaré que, vu le contexte actuel, les usines de retraitement Japonaises ne s’avéreraient ni rentables ni souhaitables, les populations locales risquent donc de se retrouver avec un site ne servant qu’à stocker pour des périodes infinies de plus en plus de déchets de l’industrie électronucléaire et s’en émeuvent à juste titre en réclamant l’enlèvement rapide de l’ensemble des poubelles nucléaires récupérées de l’ensemble du pays et qui ont été entreposées à Hokkaido en vue d’un retraitement qui ne viendra probablement jamais. Ce n’était pas le contrat défini initialement entre la municipalité et les autorités qui exploitent le site ; le nucléaire ne tient décidément aucune de ses promesses…

Rokkasho : empiler des fûts radioactifs, cela mène où ?


(1) La Zone atomique « grise » comprend les pays qui détiennent plus que probablement au moins une arme atomique ou sont susceptibles de la fabriquer ou de l’obtenir extrêmement rapidement en cas d’agression – une espèce de dissuasion retardée en quelque sorte

(2) Le gouvernement réfléchit entre 3 options : zéro électronucléaire, 25% ou 50% de la production électrique à l’horizon 2030

(3) Préfecture d’Aomori, à l’extrême Nord de l’île de Honshu

(4) Un peu hâtivement et pompeusement baptisée « La Hague II »