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JEAN SIMEON CHARDIN (PARIS 1699-1779)
- Le Bénédicité (esquisse)

Contemporary, modern and old century works of art at auction for buyers and collectors at Christie’s auction house

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JEAN SIMEON CHARDIN (PARIS 1699-1779)
Le Bénédicité (esquisse)
Lot Description

JEAN SIMEON CHARDIN (PARIS 1699-1779)
Le Bénédicité (esquisse)
huile sur toile
46,5 x 38 cm.

Lot Condition Report
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Special Notice

No VAT will be charged on the hammer price, but VAT payable at 19.6% (5.5% for books) will be added to the buyer’s premium which is invoiced on a VAT inclusive basis

Provenance

Probablement Antoine-Joseph Dezallier d'Argenville; sa vente, Paris, 18 janvier 1779, lot 481 ('l'étude d'un Bénédicité, esquisse peinte l'huile par Simon Chardin').
François Marcille ; sa vente, 12 janvier 1857, lot 20.
Vente anonyme, Paris, 22 janvier 1867, lot 12.
Vente B., 22 février 1875, lot 565.
Baron de Beurnonville ; sa vente, 21-22 mars 1883, lot 8.
E. Borthon (Dijon), 1890, lot 16.
Collection Raoul d'Hotelans, Novillars, 1906.
Arthur Georges Veil-Picard ; par descendance au propriétaire actuel.

Literature

P. Hédouin, 'Chardin', dans Bulletin des Arts, 10 novembre 1846, p. 227, no. 100.
P. Hédouin, Mosaïques. Peintres. Musiciens, artistes dramatiques à partir du XVe siècle jusqu'à nos jours, Paris, 1856, p. 201, no. 100.
C. Blanc, Histoire des peintres de toutes les écoles : Ecole française, Paris, 1862, p. 6-7.
Boucher,'L'exposition de la vie parisienne au XVIIIe siècle au Musée Carnavalet', dans Gazette des Beaux-Arts, avril 1928, p. 198.
G. Wildenstein, Chardin, Paris, 1933, no. 80.
M. Proust, dans Le Figaro Littéraire, 27 mars 1954.
Goncourt, 'Chardin peintre de la vie bourgeoise' dans Jardin des arts, janvier 1959, p. 160.
G. Wildenstein, Chardin, Paris, 1963-69, p. 185-186, no. 197.
R. Huyghe,'Chardin', dans Jardin des Arts, avril 1965, p. 11.
P. Rosenberg, 'le XVIIIe siècle français à la Royal Academy', dans Revue de l'Art, no. 3, 1969, p. 99.
M. Roland Michel, 'Chardin : exposition du Grand Palais', dans Encyclopedia Universalis, Paris, 1980, p. 461-462.
P. Rosenberg, Chardin, tout l'oeuvre peint, Paris, 1983, p. 99, no. 119.
P. Conisbee, Chardin, Oxford, 1986, pp. 165-166.
M. Roland Michel, Chardin, Paris, 1994, p. 214.
P. Rosenberg, R. Temperini, Chardin, Paris, 1999, p. 251, no. 120.
P. Rosenberg dans cat. expo, Chardin, Paris, 1999, p. 247.

Exhibited

Besançon, Musée des Beaux-Arts, Exposition rétrospective des arts en Franche-Comté, 1906, no. 18.
Paris, Musée Carnavalet, La Vie au XVIIIème siècle, 1928, no. 34.
Paris, galerie Pigalle, Exposition des oeuvres de J.B.S Chardin, 1929, no. 51.
Paris, galerie Charpentier, L'Enfance, 1949, no. 51.
Paris, galerie Heim, Hommage à Chardin, 1950.
Londres, Royal Academy, France in the eighteenth Century, 1968, no. 120.
Paris, Grand Palais, Chardin, 29 janvier-30 avril 1979, no. 85.

Lot Notes

En 1728, Jean Siméon Chardin fut reçu à l'Académie en tant que 'peintre de natures mortes'. De façon exceptionnelle, il avait été reçu le jour même de son agrément, ce qui constitue une preuve de l'estime et de l'admiration que lui portaient ses collègues. Mais la nature morte était, selon les critères définis un demi-siècle plus tôt, le genre pictural le plus mineur, à l'opposé de la peinture d'histoire qui requérait culture et invention. Chardin, conscient bien sûr de cette hiérarchie, avait tenté dans sa jeunesse de se former au dessin et de suivre les enseignements d'un peintre d'histoire. Il est probable que sa lenteur face au modèle, sa minutie et son perfectionnisme furent les principales raisons qui le cantonnèrent alors dans la représentation des sujets les plus humbles, tout d'abord du gibier et des fruits. Ces oeuvres s'adressaient à des amateurs de milieux modestes et ne méritaient pas, aux yeux des contemporains de Chardin, d'être gravées : elles étaient donc peu lucratives. Au début des années 1730, l'artiste commença à peindre des scènes de genre. Celles-ci furent immédiatement appréciées et lui valurent de nouveaux commanditaires, aussi bien au sein de l'aristocratie française que parmi les amateurs étrangers les plus éclairés. Le Bénédicité (fig. 1), présenté avec son pendant La Mère laborieuse (fig. 2) au Salon de 1740 avant d'être offert au Roi Louis XV la même année, fut peut-être la plus illustre de ces scènes de genre. Gravé par Lépicié en 1744, le tableau donna lieu à plusieurs variantes peintes ou retouchées par Chardin lui-même durant plus de vingt ans (ces versions se trouvent désormais dans les plus grands musées.) Si l'on s'interroge encore aujourd'hui sur le statut de chacune d'entre elles -version autographe ou copie?- celui de notre Bénédicité n'est pas quant à lui sujet au doute : il s'agit de la seule esquisse connue du chef-d'oeuvre du Louvre, témoignage unique de la méthode de travail adoptée par Chardin à cette époque.

Chardin donne dans ses oeuvres l'illusion d'une aisance absolue, d'un pinceau qui sait sans effort non seulement reproduire la réalité mais transcrire la nature profonde des êtres et des objets dans leur essence même. Cette impression est toutefois fallacieuse : tous les témoignages écrits montrent qu'au contraire Chardin peinait devant le motif, qu'il travaillait très lentement, ce que ne cesseront de lui reprocher ses commanditaires. Lui-même souhaitait que ne sortent de son atelier que des oeuvres qu'il trouvait parfaites, et reste très discret sur sa technique. Cette humilité, cette subordination au sujet face auquel le peintre, sa carrière durant, s'effacerait, est contredite par la présente esquisse. Celle-ci montre une grande liberté; elle constitue plus à ce titre une première pensée qu'une esquisse, très différente de la composition finale. Ainsi, les personnages sont placés différemment, la mère est assise et non pas debout, la grande soeur à l'extrême gauche et non pas au centre de la composition. A droite, un petit cheval de bois sera remplacé par une coussole (une poêle). La fillette ébauchant le geste de prière tient une étoffe qu'examine sa mère. Cette étoffe deviendra la broderie de La Mère Laborieuse. Une fenêtre est ouverte sur un coin de ciel bleu, évocation rare d'un paysage chez ce peintre 'claustrophile' (P. Rosenberg et R. Temperini, op. cit., p. 30). Alors que dans l'oeuvre finale, le temps semble s'être arrêté, on a l'impression ici d'un chaleureux dialogue entre la mère et sa fille assise. Ne peut-on pas même voir, dans les visages des enfants, une certaine espièglerie ?

On ne peut qu'être sensible à la démarche du peintre, qui livre ici, avec virtuosité (et rapidité semble-t-il), une pensée sur laquelle il reviendra. La spontanéité du tableau se manifeste dans la matière épaisse et grumeleuse, la touche grasse, si éloignée du fini porcelainé du Bénédicité de 1740. Dès les frères Goncourt, il fut reproché à cette dernière oeuvre son absence de verve et sa trop grande sagesse, qui avaient tout d'abord déterminé son succès. Le Bénédicité, l'une des images les plus connues du XIXème siècle, avait servi un propos moralisateur : pour les contemporains de Michelet le tableau illustrait l'existence au XVIIIème siècle d'une classe sociale pieuse et laborieuse, bien éloignée de la frivolité et de la sensualité d'une certaine noblesse française amatrice de Boucher et de Fragonard et dont les débordements auraient bientôt pour conséquence la Révolution française. Le caractère moral des oeuvres est évident chez Greuze; il ne l'est pas chez Chardin. La prière précédant le repas est pour lui l'un de ces instants de silencieuse intimité, propices à la rêverie et aux tendres échanges de regards, qu'il affectionnait particulièrement. Ainsi, les critiques qui furent faites au Bénédicité du Salon de 1740 peuvent sembler injustes. Il est néanmoins à noter que ces reproches ne sauraient s'adresser à notre esquisse, si différente dans son esprit.

La liberté du tableau a pu surprendre. La magistrale exposition Chardin de 1979 permit, pour la première fois, de présenter ensemble les trois esquisses connues de l'artiste, et d'intégrer définitivement celles-ci à son corpus.

On sait, d'après l'inventaire après décès de l'artiste, qu'il possédait au moment de sa mort une douzaine de ses propres esquisses. On n'en connaît plus que trois aujourd'hui, toutes des scènes de genre. L'une (Paris, collection privée) prépare L'Econome (Stockholm, National Museum) vers 1746. L'autre est celle des Aliments de la convalescence peinte vers 1747 (Washington, National Gallery of Art). Beaucoup plus proches des compositions finales que ne l'est l'esquisse étudiée ici, ces deux oeuvres livrent moins d'éléments sur la démarche créatrice du peintre.

L'histoire du tableau, que possédèrent deux des collectionneurs les plus avisés de leur temps, prouve que les qualités de celui-ci furent appréciées dès le XVIIIème siècle. Antoine-Joseph Dezallier d'Argenville (1680-1765) fut l'un des fleurons de l'élite intellectuelle du Siècle des Lumières. Amateur d'un goût parfait, qu'il ne cessa de perfectionner lors de ses voyages en Italie, il collectionna toute sa vie les tableaux, dessins, gravures et objets de curiosité. S'il collabora à l'Encyclopédie de Diderot, il reste avant tout connu de tous les amateurs d'art pour son Abrégé de la vie des plus fameux peintres (Paris, 1745).
Nombre des dessins et tableaux de sa collection sont désormais au Louvre. On sait que Dezallier d'Argenville possédait une esquisse du Bénédicité. Un croquis fait par Gabriel de Saint-Aubin, en marge du catalogue de la vente après décès du grand collectionneur, n'est malheureusement pas assez précis pour l'identifier avec certitude à celle de la collection Veil-Picard, mais en l'absence d'une autre ébauche mentionnée ou retrouvée, tout porte à croire que le tableau figurait jadis dans cette collection extraordinaire.

Grainetier aisé d'origine orléanaise, Martial François Marcille (1790-1856) devint avec ses deux fils le détenteur de la plus grande collection d'oeuvres de Chardin jamais réunie en mains privées. Ce peintre amateur fréquentait assidûment le Louvre où il put admirer les deux pendants du Bénédicité et de la Mère Laborieuse. Plusieurs chefs d'oeuvre de sa collection, tels le Portrait de Mademoiselle Guimard de Fragonard ou Le déjeuner de François Boucher (tous deux aujourd'hui au Louvre) figurent avec l'esquisse du Bénédicité dans la vente de nombreuses oeuvres lui appartenant, qui se tint à Paris le 12 janvier 1857.

For an english version of this note, please visit www.christies.com.
Jean Simeon Chardin (Paris 1699-1779)
Le Bénédicité (sketch)
oil on canvas
18¼ x 15 in.( 46,5 x 38 cm.)

Provenance, exhibition and bibliography : see above

In 1728 Chardin entered the Académie as a 'painter of still lifes'. Exceptionally, he was received into the Académie on the very day of his nomination, without any further deliberation, demonstrating the esteem and admiration in which he was held by his colleagues. This belies the fact that still-life painting was a genre generally considered inferior to all others, above all to history painting, which was held to require great cultivation and inspired invention. Highly conscious of this traditional hierarchy, Chardin had himself studied to be a history painter. It may have been due to his methodical, painstaking approach to his models, his creative perfectionism and his meticulous technique that he would eventually focus on the representation of game and fruit. Still-life paintings were destined for a relatively modest audience and were not considered worthy of being engraved, which would have brought a further revenue to the artist. In the early 1730s Chardin turned to genre painting. His success grew immediately, and brought to the artist a new clientele of aristocrats and wealthy travellers. In 1740 Chardin exhibited Le Bénédicité and its pendant La Mère laborieuse at the Salon, before offering them to the King. The success of these compositions was immediate and immense. The Bénédicité was engraved by Lépicié in 1744, and the artist was to produce numerous versions of it over the next twenty years. Whether these versions are today to be considered autograph replicas as opposed to copies has been subject to much debate. However, the status of the present work, the only known sketch for the Louvre painting, is not subject to any doubt. It is an unique testimony to Chardin's way of working.
Chardin's paintings convey a profound understanding of human nature in impressively realistic settings, all rendered in an apparently simple and effortless style. This impression contrasts with what we know of Chardin's habits from his contemporaries, all of whom testify to the difficulties he faced in bringing his pictures to completion, and to the impatience of his patrons who found themselves faced by a lengthy creative process. Chardin was determined that no picture should leave his studio unless it was perfect and, to protect his interests, was secretive about his working methods. This methodical thoroughness is somewhat contradicted by the freedom of the present sketch, which is more of a 'first thought' for the Louvre painting than a traditional compositional model. Many differences are evident between the sketch and the finished painting, showing the fluidity and flexibility of Chardin's working process. In the sketch the mother is seated, while the elder sister stands on the left; in the Louvre picture, the mother stands, while the elder sister sits in the centre of the composition. The charming detail of the wooden horse, on the right in the sketch, is replaced in the finished picture with a household pan. The piece of white cloth which the child holds and the mother examines, in the sketch, becomes an embroidery in La Mère laborieuse. Unusually for an artist who is often considered 'claustrophobic', a window at the left of the sketch opens out onto a brilliant blue sky (P. Rosenberg and R. Temperini, op. cit. p. 30). The most fundamental difference between painting and sketch, however, lies in the relationship between the mother and her children. Whereas the Louvre painting seems to represent a frozen moment in time, the sketch suggests a warm and lively interchange taking place between mother and child; there seems, even, to be a hint of mischief on the children's faces.

The Bénédicité, which became one of the most popular images of the 19th Century, had a moral as well as an artistic appeal. For Michelet and his contemporaries it embodied the modesty of a religious, hard-working middle class, its simplicity set against the superficial and frivolous aristocracy represented by Boucher and Fragonard, whose decadent excesses would eventually lead to the Revolution. Yet whereas some artists, such as Greuze, emphasised the morals in their own works, Chardin was more subtle. When depicting the grace, said before dinner, he focused on the intimacy of the family, their modest contemplation enlivened by the affectionate interchange of glances which often appears in his work.

The spontaneous brushwork of this sketch, applied in broad and vigorous strokes, contrasts with the porcelain finish of the completed painting, which catered to the polished taste of the time. Nevertheless, by the nineteenth century, that same taste would be criticised by commentators, such as the Goncourt brothers, for its lack of spirit and 'verve', a quality which is nevertheless abundantly evident in this preparatory sketch. It is one of only three sketches by Chardin known at the present time, although when the artist died his posthumous inventory recorded a dozen sketches in his studio. The three were presented together for the first time in the distinguished exhibition on Chardin. One of the two other known sketches, (Paris, Private collection) is preparatory for L'Econome (Stockholm, National Museum) and is therefore datable to circa 1746; the other (Private collection) is preparatory for Les Aliments de la convalescence (Washington, National Gallery). Both are closer in composition and spirit to their related paintings, and so the freedom of expression in the present sketch affords a unique insight into Chardin's working methods.

During its history, the Veil-Picard sketch has belonged to two particularly illustrious collectors. The first, Antoine Joseph Dezallier d'Argenville (1680-1765), was part of the 'elite' of the Siècle des Lumières. An enthusiastic dilettante, he travelled to Italy several times and assembled a superb collection of drawings, pictures, engravings and curiosities. He contributed to Diderot's Encyclopedia and wrote an Abrégé de la vie des plus fameux peintres (Paris, 1745). Many of his paintings and drawings are now in the Louvre. A sketch for the Bénédicité was included in his posthumous sale and was drawn in the margin of the catalogue by Gabriel de Saint-Aubin. Although this drawing is not detailed enough to be absolutely certain that it shows the Veil-Picard picture, no other sketch is known and so it has been widely accepted that the present work is the sketch which belonged to this great collector.

Martial François Marcille (1790-1856) and his two sons assembled the greatest private collection of Chardin's paintings. An amateur painter, Marcille regularly visited the Louvre, where he admired the Bénédicité and its pendant La Mère Laborieuse. Alongside the present sketch, his collection included many masterpieces of French eighteenth century painting, such as the Portrait of Mademoiselle Guimard by Fragonard, or Le Déjeuner by Boucher (both now in the Louvre), all of which were listed in his posthumous sale in Paris on 12 January 1857.

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