La Gazette Drouot
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L'agenda de la semaine
L'agenda des ventes aux enchères
Jacques Prévert (1900-1977), Les Visiteurs du soir, 1942, planche scénaristique,
plume et crayons de couleur, 49,5 x 64,5 cm .Estimation : 40 000/50 000 €.

En couverture cette semaine

Venus de nulle part, deux cavaliers se détachent au sommet d’une crête et cheminent dans les lacets qui mènent au château. Le générique, se feuilletant comme un livre d’heures, lève un coin du mystère : "Or donc, en ce joli mois de mai 1485 Messire le Diable dépêcha sur terre deux de ses créatures afin de désespérer les hommes." Bigre ! Le Diable... Le film est sorti le 5 décembre 1942. Il valait mieux alors se tourner vers des temps éloignés et s’échapper au pays de la poésie et du fantastique. C’est ce qu’ont compris Marcel Carné et Jacques Prévert, séparément, le réalisateur à Paris et le scénariste en zone libre, partant s’installer à Saint-Paul-de-Vence, proche d’Alexandre Trauner - décorateur habituel de leurs films - et de Joseph Kosma, compositeur. Le premier travaille à une adaptation des Bottes de sept lieues avec Marcel Aymé, puis à une variante du conte Juliette ou la clef des songes, inspiré de La Barbe bleue de Perrault. Prévert et Trauner planchent sur Le Chat botté. Carné, en manque de tournage, se décide à aller rendre visite à son ami. Ils ont déjà plusieurs films en commun depuis Jenny, en 1936, déjà avec Joseph Kosma et le chef opérateur, Roger Hubert. Qui ne se souvient de "bizarre, bizarre" murmuré par Louis Jouvet dans Drôle de drame, en 1937  Ou encore de l’inoubliable "T’as d’beaux yeux, tu sais !" de Quai des brumes, l’année suivante  Prévert, proche du groupe surréaliste, celui plus libre de la rue du Château, sait manier les mots, écrire des dialogues avec célérité pour les pièces jouées par la troupe Octobre aux sorties des usines. Il faut faire mouche et Prévert excelle à cet exercice. La planche scénaristique qui porte en titre "Le bal des faux amants" constitue une base de travail, avec des notations, des dessins. L’histoire est déjà en place dans sa quasi-totalité. La scène du bal, au début du film, est tournée au ralenti, la musique s’arrête comme un disque enrayé. Dominique, émissaire du démon, "la femme en homme", va chercher Renaud, le fiancé de la jeune Anne qui reste plantée là et que Gilles, l’autre ménestrel du diable, force à venir le rejoindre. La feuille présente quinze bandes pour autant de rôles, chacune comportant quelques descriptions de caractères ou de leur suite dans l’histoire. Certains vont disparaître comme la femme du seigneur, le baron Hugues joué par Fernand Ledoux. Quant au "ménestrel" Gilles - rôle joué par Alain Cuny -, "au début il se montre le plus simple, le plus tendre des “amants” (1° scène d’amour) puis brutalement tourne en dérision son amour, avoue qu’il simulait, et qu’il va s’en aller et ce au moment même où la j. fille lui prouve son amour le plus absolu..." Prévert raconte une terrible histoire de séduction et de jalousie qui mène à l’horreur et à la mort. Mais conduite comme dans un rêve, le rêve de la jeune Anne - "oiseau sans cage [...] elle fait l’amour avec le ménestrel et n’en éprouve aucun remords... au contraire". Le coeur a ses raisons, comme va le découvrir le diable - fantastique Jules Berry. Pour les amants, il ne cessera de battre... Gilles ne chantait-il pas : "Mais dans tes yeux entrouverts / Deux petites vagues sont restées / Démons et merveilles / Vents et marées / Deux petites vagues pour me noyer" 

Paris, Drouot-Richelieu - salle 1. Mercredi 9 juin.
Ader SVV. M. Bodin, Cabinet Perazzone - Brun.

Nord Gabon, Fang du Sud. Figure de reliquaire byéri féminin, bois à patine brune, h. 49,5 cm (détail). Estimation : 600 000/800 000 €.

La collection Kerchache ou la recherche de l'absolu

À propos de jacques kerchache, les mots qui reviennent le plus souvent sont "passionné" et "il avait un oeil". La passion, justement, l’a amené très jeune à parcourir le monde, arpentant la planète avec une soif incroyable de connaissance et de découverte. Pierre Amrouche emploie l’expression rimbaldienne "l’homme aux semelles de vent". Tous savent l’oreille attentive puis amicale de Jacques Chirac, son soutien sans faille pour faire pénétrer les arts primitifs au sein du musée du Louvre, sur un pied d’égalité avec les icônes des arts antique et occidental : le Pavillon des Sessions est inauguré en avril 2000, le projet du musée du quai Branly adopté, que son promoteur, décédé en août 2001, ne verra pas. On peut être plus surpris d’apprendre que tout en s’occupant de sélectionner les oeuvres des arts primitifs Jacques Kerchache entreprit une collection d’insectes. À sa façon, c’est-à-dire avec une vision esthétique et non le seul oeil averti d’un spécialiste. Il acquiert des planches brutes et sélectionne les plus beaux spécimens pour réaliser des compositions sur fond noir ou blanc. Ainsi, il a réuni dans une boîte, estimée 400 € environ, trois Pandinus imperator, scorpion empereur provenant de Côte d’Ivoire, qui, adulte, peut atteindre la taille de 20 cm. Son corps imposant est d’un noir brillant, ses pinces, dont il se sert plus que de son dard, remarquablement larges. L’insecte est ici présenté tel un magnifique sceptre. Jacques Kerchache avait conservé cette faculté de s’enrichir du choc des civilisations, de trouver une réponse à ses interrogations aussi bien dans une sculpture en bois laqué polychrome d’un mendiant affamé, travail birman du XIXe siècle (3 000 €), que dans les écailles en cuir laqué brun noir, imitant celles d’un poisson, d’une armure (80 000 €) avec sa boîte en laque rouge au mon ("blason") des Waka-Bayashi. Celle-ci avait figuré dans la collection Arman, exposée au Grand Palais en 1992. À chercher derrière l’apparence des choses la vanité de l’existence et la présence de la mort, le collectionneur cultive un goût certain pour le morbide, accumulant nombre de représentations de squelettes et d’écorchés, en particulier les planches anatomiques de Gautier Dagoty (estimées entre 3 500 et 6 000 €). Venons-en cependant à la grande passion, son obsession : les arts premiers, en particulier l’art africain qu’il avait su reconnaître très tôt, qu’il étudia sur place et confronta aux autres formes d’art. Il sut admirer, aimer, récolter les "fleurs fragiles de la différence" de Lévi-Strauss. Il suffirait de citer un avant d’arche rituelle dogon en forme de tête de cheval, pour lequel il faut prévoir quelque 50 000 €, exceptionnel par ses dimensions (45 cm de haut, 50 de large), par sa qualité et son ancienneté (certains catalogues lui attribuent une datation XVIe ou XVIIe siècle)… Mais aussitôt, on remarque une figure de reliquaire kota mahongwe en bois, cuivre, laiton et fer (100 000 €), entrée dans sa collection très tôt et reproduite dans Le M’Boueti des Mahongoué, qu’il a publié en 1967. Et que dire de la figure de reliquaire byéri féminin, du peuple Fang du Sud (voir photo du détail) ! Jacques Kerchache possédait déjà cette sculpture - qui aurait selon ses dires appartenu à Paul Guillaume - lors de l’exposition de Zurich en 1970. La vedette de cette vacation revient toutefois à un roi tschokwe jouant de la sanza (piano à pouces africain). L’estimation est en effet comprise entre 1 et 1,5 M€ pour cette sculpture provenant d’Angola, en bois brun à patine brillante et ayant conservé des traces d’implantation de cheveux sur le crâne et la barbe. Un travail étonnamment dynamique, surtout dans le visage et le haut du corps, où les courbes se fondent les unes dans les autres. Rendant hommage à son ami, Jacques Chirac écrit : "Car, au-delà de la perfection formelle de chaque oeuvre, Jacques Kerchache admirait surtout l’artiste, homme d’inspiration, de sensibilité et de génie". Son cabinet de curiosités est là pour en témoigner. •

samedi 12 et dimanche 13 juin, Drouot-Montaigne à 16 h. Pierre Bergé & Associés SVV. Mmes David, Collignon, MM. Weil, Delerm, Lachaume, Portier, Millet, Boutonnet, Kunicki, Roudillon, Monbrison, Amrouche.
Albert Gleizes (1881-1953), Paysage cubiste, 1914, huile sur toile, 73 x 90 cm.
Estimation : 300 000/400 000 €.

De la théorie à la pratique

Si les oeuvres d’Albert Gleizes sont loin d’être rares sous le marteau, celles de la qualité de notre Paysage cubiste se comptent sur les doigts d’une main. Témoin de sa volonté d’appréhender "l’objet non plus considéré d’un point déterminé, mais définitivement reconstruit suivant un choix successif que son propre mouvement lui permet de découvrir", notre toile offre la vision fragmentée d’un panorama urbain. Les formes s’enchevêtrent, savamment déconstruites, s’élèvent pêle-mêle, entrecoupées de poutrelles métalliques et de ponts à haubans. Les figures géométriques sont cernées de "menus traits qui ne définissent pas mais suggèrent". Notez le rouge, le bleu indigo et le vert bouteille, la palette sourde des gris, les points de vue multiples… Pour Gleizes, il ne s’agit surtout pas "d’imiter le monde au point de s’y méprendre", mais bien au contraire de représenter les éléments dynamiques de la vie moderne. Une démonstration plus que convaincante pour cet artiste, fils d’un dessinateur sur étoffes, neveu du peintre néosymboliste Léon Comerre, fervent admirateur de l’oeuvre d’Ernest Renan et d’Auguste Comte, auteur de nombreuses études sur l’art dans ses rapports avec la religion et la société. Question écrits, Vassily Kandinsky (1866-1944) en a signé également. Un premier en 1912, intitulé Du Spirituel dans l’art, dans lequel il définit un "langage esthétique fondé sur les correspondances et les fonctions expressives et symboliques des couleurs et des formes", un second en 1926, issu de ses années de recherches au sein du Bauhaus, Point et ligne sur plan, dans lequel il développe ses travaux. Autant de théories que l’on retrouve appliquées dans une Composition exécutée en 1941, associant les trois couleurs primaires, jaune, bleu et rouge. Estimée entre 160 000 et 200 000 €, notre gouache fut donnée le 10 mars 1945 par Nina Kandinsky, son épouse, à un certain monsieur L., en remerciement de sa fidèle amitié, et est depuis resté dans sa succession. "La peinture est un art, et l’art dans son ensemble n’est pas une création sans but qui s’écoule dans le vide. C’est une puissance dont le but doit être de développer et d’améliorer l’âme humaine", écrit l’artiste. Vaste entreprise !

Mardi 8 juin, espace Tajan, 20 h.
Tajan SVV.
Pierre Bonnard (1867-1947), Jeune Fille au chien dans le parc du Grand-Lemps (Dauphiné), 1900, huile sur carton contrecollé sur panneau, 53 x 71 cm. Estimation : 150 000/200 000 €.

Des goûts et des couleurs

Difficile d’imaginer que ces deux cent soixante-dix objets partageaient le même écrin, à savoir un hôtel particulier parisien. Une fois n’est pas coutume, commençons par ceux proposés en seconde partie d’après-midi : les objets d’art et les meubles. Les amateurs seront servis, incontestablement. Ici, un bureau cylindre à guillotine en acajou, travail de l’Est de la France, fin XVIIIe (10 000/15 000 €), une sellette porte-torchère en marqueterie Boulle d’époque Louis XIV attribuée à Pierre Gole (5 000 €), suivie d’un bureau Mazarin de même facture et époque (15 000 €). Sans oublier des commodes XVIIIe, une pendule en bronze doré et patiné des années 1750, illustrant L’Enlèvement d’Europe (15 000/18 000 €), une paire de grandes potiches en porcelaine de Canton, d’époque Louis-Philippe, à décor de scènes de palais (6 000 €) et de nombreuses représentations féminines ou enfantines, en bronze ou en terre cuite, XIXe. L’originalité, c’est plutôt parmi les tableaux qu’il faudra la chercher. Des compositions d’André Lanskoy, Georges Valmier, Albert Gleizes partagent les cimaises avec deux natures mortes d’Édouard Pignon (12 000 €) et André Lhote (45 000 €) mais surtout avec une composition abstraite de 1991 due à Zao Wou-ki (150 000/200 000 €). Les amateurs de marines auront le choix entre une vue crépusculaire, Bassin de Saint-Pierre avec l’abbaye aux dames, Caen, 1859, signée Stanislas Lépine (35 000 €) et une paisible vue du Canal à Saint-Valéry-sur-Somme, 1891 par Eugène Boudin (40 000 €). Restant parmi les paysages, on pourra tenter sa chance sur une Vue de Saint-Tropez, 1903 par Francis Picabia, influencé par l’impressionnisme (80 000/100 000 €), un bord de mer aux Sablettes, dans les environs de La Seyne-sur-Mer, datée 1948, due à Moïse Kisling (25 000/35 000 €). Juste un détour par un classique panorama pointilliste du Quercy signée Henri Martin, La Vallée du Vert, la Chevrière (100 000/120 000 €), avant de suivre Pierre Bonnard dans le Dauphiné. L’artiste a en effet passé son enfance entre Fontenay-aux-Roses, sa ville natale, et la maison familiale du Clos, au Grand-Lemps, près de la Côte Saint-André en Isère, où il peindra ses premiers paysages (voir photo). C’est là aussi qu’il passera une grande partie de ses automnes, jusqu’à ce qu’il achète, en 1925, une villa au Cannet, plus propice à la santé de son épouse. Cette enfant jouant avec un chien est probablement l’une de ses nièces, fille de sa soeur Andrée, qui a épousé en 1890 le compositeur Claude Terrasse. Autre peintre, autre époque et autre inspiration pour Maurice Denis, dont une grande toile L’Annonciation à Fiesole, 1919 pourrait être disputée à hauteur de 80 000/120 000 €. Quant aux tableaux anciens, ils sont emmenés par un cuivre de Théobald Michau, Village flamand près d’une rivière avec une scène de marché (80 000/100 000 €), par le portrait d’Un Flûtiste dû à Hendrik Munnicks (50 000 €), illustrant l’influence du Caravage en Hollande, et enfin par une Vue de Naples et du Vésuve d’un certain Genaro Coppola, à qui l’on ne peut que souhaiter quelque enchère explosive (60 000/80 000 €).

Vendredi 11 juin, salle 5-6 - Drouot-Richelieu. Beaussant - Lefèvre SVV. Mme Sevestre-Barbé, MM. Auguier, Bacot, de Lencquesaing,
de Louvencourt.
Albert Brenet (1903-2005), Le Fujiyama, vue du lac Hakone, gouache sur papier, 1952-1953, 76 x 104,5 cm. Estimation : 4 000/6 000 €.

Voyage au long cours

À l’heure des voyages à grande vitesse et des expéditions spatiales, bienvenue dans l’univers d’Albert Brenet. Quatre-vingt gouaches, conservées par l’une de ses proches, quittent aujourd’hui son atelier breton. Une sorte de tour du monde ponctué par quelques séduisantes escales. Alors, prêts pour le grand voyage  Ceux qui ont des fourmis dans les jambes auront de quoi satisfaire leurs envies et peut-être des idées de destinations, d’autres, moins globe-trotteurs, apprécieront le dépaysement, rien qu’en regardant les oeuvres du peintre (estimées de 400 à 8 000 €). Une sorte de voyage immobile, mais tellement poétique. Pouvait-il en être autrement pour Albert Brenet, originaire de la région du Havre, et qui, enfant, dessine déjà les bateaux dans les ports  En 1920, le voilà aux Beaux-Arts, à Paris. Jusque là, rien que de très classique. Son embarquement pour sept mois sur l’un des derniers voiliers de commerce du Havre, le Bonchamps, à destination des Antilles, va déterminer le cours de sa carrière de peintre. Quant à sa technique de prédilection, la gouache, c’est à son ami Mathurin Méheut qu’il la doit. Elle convient mieux que l’huile à son oeuvre prise sur le vif. De l’enfant qui rêve sur le quai à l’adulte qui répond à l’appel du large, il n’y a qu’un pas. Ou plutôt un coup de pinceau. Peintre reporter, Brenet traite aussi bien les paysages que les personnages. Il est un témoin de son temps aussi habile à restituer l’exceptionnel que le quotidien, son incessant mouvement comme le temps qui passe. Un charbonnier l’emmène en 1933 vers la Mer Noire. Il en rapporte quelques instantanés d’Istanbul. Conquis par l’Orient, il y retourne en 1956. Direction l’Iran cette fois, et la beauté silencieuse d’Ispahan, mais aussi des montagnes. Même émerveillement au Pays du matin calme où il séjourne d’août 1952 à mars 1953 (voir photo). L’artiste travaille inlassablement et nous fait découvrir un Japon encore empreint de ses traditions. Puis, en 1958, ce sont les États-Unis, le Colorado et la Californie, mais aussi New York et Washington, dans leur démesure. Notre homme a décidément calé son chevalet aux quatre coins du globe ! Car, bien sûr, il a sillonné l’Afrique du Nord, les belles Alpes autrichiennes, l’Espagne, la Hollande, la France. Tenant son pinceau comme un journaliste son stylo, Brenet prend semble-t-il autant de plaisir à représenter un paysage qu’une locomotive, une usine, le chargement d’un cargo… Peintre de la Marine en 1936, il l’est aussi la même année de l’armée de l’Air, puis en 1959, de l’armée de Terre. Une première ! Et comme si cela ne suffisait pas, il nous laisse également des affiches pour les compagnies transatlantiques et des images prises à l’occasion des lancements des paquebots Normandie et France. Une vie particulièrement remplie pour celui dont le souhait était de procurer au spectateur autant de joie qu’il en avait eu lui-même à sillonner le vaste monde. Pari réussi.

Lundi 7 juin, salle 4 - Drouot-Richelieu.
Audap - Mirabaud SVV.
Paul-Élie Dubois (1886-1949), Le Joueur de flûte,
huile sur Isorel, 73 x 151 cm.
Estimation : 40 000/60 000 €.

L’appel du Hoggar

Notre peintre a 34 ans quand il découvre l’Algérie. Lui qui, jusque là, a représenté des natures mortes, des portraits et des paysages de son Doubs natal, ses sujets favoris, est entièrement conquis. Amoureux d’Alger, ébloui par la lumière et le ciel méditerranéen, il est bientôt envoûté par le Hoggar qu’il découvre lors d’un voyage, du 5 février au 14 mai 1928. Oubliées la faim, les brûlures du soleil et du vent. Dubois n’a qu’une idée : faire découvrir cette région. En juin 1929, le musée des Arts décoratifs parisien expose ses peintures et ses dessins montrant le désert sous ses aspects les plus divers. Le succès est énorme. Même motif, même punition, quelques mois plus tard, au Salon des Orientalistes, dans les salons du Figaro, et l’année suivante au nouveau musée des Beaux-Arts d’Alger. Ses sujets de prédilection  Les paysages, bien sûr, mais aussi les hommes et leurs costumes en particulier. Notre portrait, exposé au Salon des Artistes français, en 1943, a dû être exécuté lors de son deuxième voyage dans le Hoggar, en 1938. Difficile de ne pas tomber sous le charme de ce portrait de jeune berger se détachant sur un paysage aussi majestueux que vertigineux, ses contrastes chromatiques de bleus, de bruns, mêlés à la transparence laiteuse du ciel. Une mise en scène qui rappelle certains tableaux des primitifs italiens. Réjouissons-nous !

Mardi 8 juin, hôtel Marcel-Dassault, 20 h.
Artcurial - Briest - Poulain - F. Tajan SVV.
Pierre-Paul Rubens (1577-1640). Le Sommeil de Pan, d’après un marbre
attribué à Montorsoli. Sanguine et rehauts de craie blanche, 43 x 26,5 cm.
Estimation : 120 000/150 000 €.

Rubens et la statuaire

Lors de son séjour en Italie, entre 1601 et 1608, Pierre-Paul Rubens étudie sur place la statuaire antique et les grands maîtres italiens de la Renaissance. On connaît plusieurs dessins reprenant sous différentes faces une même oeuvre, comme Le Sommeil de Pan, un marbre attribué désormais à Fra Giovanni Angelo Montorsoli, apprenti de Michel-Ange et restaurateur de statues antiques, notamment l’Apollon du Belvédère. Rubens dut être frappé par la puissante laideur de Pan, puisqu’on connaît un autre dessin de ce même marbre. On sait qu’il conservait ses études d’après des oeuvres anciennes et qu’il fut un collectionneur insatiable... Par ailleurs, la légende de Pan lui inspire plusieurs dessins et tableaux, en particulier Pan et Syrinx, conservé maintenant au musée de Cassel. Divinité protectrice des bergers et des troupeaux, Pan est représenté avec des pieds de bouc et des cornes, la laideur de son visage caractérisant une certaine brutalité érotique. Non content de courir les bois et les bords de rivières à la poursuite de nymphes, comme Syrinx, qui pour lui échapper fut transformée en roseau (dont est faite la flûte de Pan), il pouvait déchaîner des sentiments hystériques, tout comme démembrer et éparpiller une idole - sort subi par la nymphe Echo. La "panique" ne lui doit pas pour rien son étymologie... Un sujet propre à séduire notre artiste, amoureux de la puissance de la nature et de la vie.

Mercredi 9 juin, salle 14 - Drouot-Richelieu.
Camard SVV. Cabinet de Bayser.
Bureau de pente en vernis Martin, à décor de chinoiseries, intérieur laqué rouge, cave secrète aventurinée. Ornementation de bronzes au "C" couronné. Estampillé Dubois. Époque Louis XV. 91 x 70,5 x 45 cm. Estimation : 15 000/20 000 €.

Indiscrets s’abstenir

Vous les connaissiez à fonds rouge ou noir, en voici un, beaucoup plus rare, à fond jonquille. Le terme est d’époque et s’applique ici à un décor de chinoiseries en vernis Martin. C’est sous Louis XV que les quatre frères Martin, vernisseurs-doreurs parisiens, obtiennent un brevet leur permettant d’exploiter un vernis de leur invention imitant les laques de Chine et du Japon, grâce auquel ils devinrent célèbres. Des lignes souples et élégantes, une ornementation délicate exécutée principalement en méplat afin de parfaire l’imitation des laques orientales, l’estampille du renommé Jacques Dubois, maître en 1742 et qui se fit une spécialité de ce type de décor, des bronzes au "C" couronné - poinçon imposé aux bronziers français entre 1745 et 1749 et donnant lieu à une taxe -… Notre meuble a quelques atouts. Appelé "dos d’âne", "secrétaire de pente" ou "secrétaire à dessus brisé", il a vu le jour sous Louis XV, dans le sillage du bureau à gradins. Les ébénistes imaginent alors de fermer ce dernier afin de mettre papiers et documents à l’abri des indiscrets. Si notre bureau passe de mode vers 1760, avec l’arrivée du style Louis XVI, les indélicats ne disparaissent pas pour autant. D’où l’utilité, encore de nos jours, de ce type de table.

Vendredi 11 juin, salle 10 - Drouot-Richelieu.
Doutrebente SVV. M. du Boisbaudry.
Guillaume Coustou (1677-1746), Minerve, vers 1734, terre cuite, 58 x 40 x 21 cm. Estimation : 150 000/200 000 €.

Sculptures de Coustou et biscuits de Sèvres

Près de trois cents numéros composent ce programme, qui débute avec des tableaux anciens et se termine par une tapisserie, avec entre-temps une importante sélection de porcelaines de Meissen et de Sèvres. Pour la première manufacture, on retient un plateau ovale en forme de deux feuilles superposées à décor de nervures en relief et polychrome, réalisé vers 1730-1735, évalué 10 000 €, une écuelle ronde couverte et son présentoir à décor en léger relief de motifs de vannerie et décor polychrome de tigre, bambous, hannetons et rochers percés fleuris, vers 1740 (7 000 €), et une pendule rocaille, vers 1740, pour laquelle il faut prévoir 20 000 €. Elle repose sur quatre pieds en console, le cadran cerné de rinceaux rocaille et roseaux, surmonté d’une large coquille ajourée, décor polychrome et or de scènes de chasse surmontées, au centre, d’une tête de cerf en relief, la base étant également ornée. Tout aussi exubérant, un miroir réalisé en six parties réunies par des rivets en bronze doré, à décor en relief polychrome. Ce modèle de J.-J. Kaendler, vers 1746, est estimé environ 18 000 €. Pour la manufacture de Sèvres, aux côtés d’une paire de figures en porcelaine tendre, La Baigneuse et La Baigneuse aux roseaux, d’après un marbre de Falconet pour la première et d’un modèle de cet artiste créé en 1762 pour lui faire pendant (40 000 €), et du groupe Les Trois Contents, modèle créé par Falconet à Sèvres en 1765 (20 000 €), on retient un déjeuner "Courteille", d’après le plateau portant le même nom en l’honneur du marquis de Courteille, intendant des finances de Louis XV en 1748 et en charge de la manufacture de Sèvres (20 000/30 000 €). Il porte les marques de Sèvres, la lettre "M" pour 1765 et du peintre Charles-Louis Méreaud (1756-1780), spécialisé dans la peinture de fleurs. La vedette de la section mobilier revient à un fauteuil à dossier plat en bois relaqué et abondamment sculpté de feuillages. Il faut prévoir environ 60 000 € pour ce siège attribué à Louis Cresson. Terminons en compagnie d’un objet historique, cette terre cuite figurant Minerve (voir photo), réalisée par Guillaume Coustou, l’auteur des Chevaux de Marly. Cette oeuvre exécutée vers 1734, avec son pendant Mars aujourd’hui conservé au Louvre, est en effet un projet pour les réalisations du pavillon central de la façade nord de l’hôtel des Invalides.

Mercredi 9 juin, salle 4 - Drouot-Richelieu. Daguerre SVV. Brissoneau SVV. MM. de Bayser, Derouineau, Dubois, Froissart, Millet, cabinet Turquin.
Trigonolithe à trois pointes en forme de montagne stylisée, ornée à chaque extrémité de deux têtes de divinités. Taïno, période Arawak (600-900). 34,5 x 17,5 x 15 cm. Estimation : 30 000/40 000 €.

Le pouvoir des pierres

Vient-elle des Grandes Antilles, de Porto Rico ou de Saint-Domingue  Mystère. Ce qui est sûr, en revanche, c’est que notre pierre est de la plus haute rareté avec son décor incisé de lignes concentriques au centre, ces têtes de divinités aux yeux et à la bouche grands ouverts, symboles de vision extra-lucide du shaman, de la parole sacrée et de la tradition. Au milieu, une cavité permettait, probablement, de préparer des potions aux vertus hallucinogènes ou prophylactiques. Le renflement, lui, évoquerait le couple primordial - virilité et fécondité -, mais aussi, selon Jacques Kerchache, la nourriture de base des indiens Taïno, l’igname, tubercule à racine tripode. "Les pierres à trois pointes abstraites dont les lignes virtuelles suggèrent plus qu’elles ne disent, n’ont pu être créées que par une sorte de Brancusi des Grandes Antilles…", nous dit encore celui-ci. Objets de grande dévotion, ces pierres conservées à la maison avaient le pouvoir de faire tomber la pluie, d’attirer la foudre pour le feu, de favoriser la fertilité. À moins qu’elles ne représentent le dieu Yocahu, "le père créateur", être suprême, immortel, intangible et invisible, vivant dans le ciel. Gageons qu’en revanche, les enchérisseurs seront bien présents pour se disputer le précieux caillou…

Mardi 8 juin, Drouot-Montaigne.
Castor - Hara SVV. M. Reynes.
?Nevers, XVIIIe siècle. Fontaine de table couverte, h. 87 cm. Estimation : 60 000/80 000 €.

De Bordeaux à Nevers en passant par Sèvres

Pendant trois siècles, Bordeaux fut une possession anglaise, capitale de la Guyenne rattachée à la Couronne suite au mariage d’Aliénor et Henri II Plantagenêt. La ville s’agrandit de nouveaux faubourgs et de quartiers neufs, protégés par des enceintes. Au-delà des remparts, les chartreux s’installent sur les bords de la Garonne, lieu connu sous le nom de couvent des Chartrons. Sites connus de tous les Bordelais, ces divers lieux ont été le sujet favori d’un peintre de la ville, Jean-Paul Alaux, ancien élève d’Horace Vernet à l’école des beaux-arts de Bordeaux, dont il devint le directeur pendant plus de vingt-cinq ans. Alaux expose au salon dès 1827 des vues de Bordeaux, fort prisées, comme les deux tableaux présentés ici, figurant l’activité du port et le bel alignement des façades (8 000/12 000 €). Après avoir noté une peinture de Giuseppe Zocchi, Sculpteur dans son atelier, estimée 10 000 € - un tableau qui peut être rapproché d’un dessin de cet artiste figurant La Peinture et conservé aux Offices à Florence -, ainsi qu’une huile sur panneau de Mose Bianchi di Giosue, représentant une Scène de boulevard à Paris (20 000 €), on s’intéressera aux bijoux. Un camée en agate brune zonée, sculptée à l’effigie de Minerve en buste, daté selon Claude d’Allemagne, ancien conservateur du musée de Laarne, du Ve siècle de notre ère, est attendu à environ 15 000 €. Un collier articulé en platine et or gris, supportant un motif central détachable ajouré et à pampilles, et transformable pour former deux bracelets et un tour de cou, est entièrement pavé de diamants ronds de taille ancienne et rehaussé de trois motifs d’onyx. Ce travail des années 1920 dans un écrin de la maison Garrard (25 000 €) côtoie un collier de chien de forme ruban ajouré, articulé et serti de perles fines en chute et diamants de taille ancienne, un travail étranger de la fin du XIXe siècle estimé 28 000 €. Le chapitre consacré à la céramique propose un vase provenant de l’ancienne collection Alphonse de Rothschild, à rubans, en porcelaine tendre de Sèvres, daté 1767 et estimé 40 000 €, ou une paire de cuvettes à fleurs dite " Courteille ", toujours en porcelaine tendre de Sèvres mais de l’année 1771 (25 000 €). Notons encore pour cette manufacture une assiette provenant du service à perles et barbeaux de Marie-Antoinette, 1781, attendue à environ 15 000 €. Cependant, la vedette revient à une fontaine de table couverte en faïence de Nevers, réalisée au XVIIe siècle (voir photo), période faste pour cette fabrique, dont on oublie qu’elle pouvait rivaliser avec les productions italiennes. Une palette de couleurs hardies, des formes inspirées de l’orfèvrerie font le charme et la rareté de ces pièces de forme, qui déclinent un décor mythologique entre des frises de draperies détachées, de lauriers tressés et d’arceaux. Notre fontaine peut se vanter également d’un pedigree intéressant, puisqu’elle a figuré dans les collections du marquis de Bailleul, de Ploquin, Perrot et Gilbert Lévy et présentée lors de l’exposition Céramiques nivernaises, à Nevers en 1937. Pour clôturer cette vacation en beauté, une commode " à la grecque " en placage de bois de rose et de marqueterie de cubes dans des réserves soulignées de filets d’amarante à grecques, à l’estampille d’oeben, est assortie d’une estimation de 60 000 €, un secrétaire en acajou mouluré, estampillé Riesener, nécessitant pour le moins 50 000 €.

Jeudi 10 juin, salle16 - Drouot-Richelieu. Pescheteau-Badin SVV. Mmes Fouchet, Jactel, Buhlmann, David, cabinet Serret - Portier, MM. Godard-Desmarest, Lepic, Froissart, L’Herrou, Millet, Perras, Benelli.
Table de salon à plateaux ovales, plateau supérieur monté à crémaillère orné d’une plaque en porcelaine de Sèvres, estampille de M. Carlin et poinçon de jurande, époque Louis XVI, 78 x 38,5 x 31,5 cm.
Estimation : 150 000/250 000 €.

L’utile et l’agréable

Précieux, féminin, léger… Tels sont les qualificatifs régulièrement employés pour désigner le mobilier de Martin Carlin, reflet des nouvelles tendances de la fin du XVIIIe siècle. Révolu, le temps des fastes ! Le bon goût préconise désormais la sobriété des lignes, dont l’élégance s’accommode à merveille de matériaux d’exception. Et puis, le mobilier s’adapte à un nouveau mode de vie, les réceptions intimes dans de petits appartements confortables étant préférées aux pompeuses cérémonies d’antan, dans les vastes salles d’apparat. Destinées à de multiples usages, les petites tables peuvent être employées comme simples serviteurs ou se transformer, pour jouer le rôle de tricoteuse ou encore celui de pupitre à musique. Pour réaliser ces meubles incontournables, le marchand mercier Poirier a trouvé son ébéniste : Martin Carlin. Reçu maître en 1766, celui-ci se fera une spécialité du mobilier précieux et saura séduire les commanditaires les plus en vue. De leur association naîtront plusieurs variantes de tables, du modèle à plateau unique rabattable jusqu’à celles "en marmotte", c’est-à-dire équipées de bras de lumière mobiles à crémaillère. Sur notre meuble, cette dernière sert à adapter la hauteur du seul plateau supérieur, orné d’une plaque de Sèvres. Féminin, le sujet de la porcelaine présente un panier débordant de fleurs : des espèces policées, comme les roses et les tulipes, sont subtilement associées à la fantaisie des fleurs des champs. Parure incontournable du style Louis XVI, un ruban violet noué autour d’un clou suspend virtuellement la corbeille, encadrée par une bordure bleu turquoise et une frise perlée dorée. Deux marques nous renseignent sur cette plaque : deux "L" entrelacés, signature de la manufacture royale, et les trois points désignant l’auteur de son décor, le peintre Jean-Baptiste Tandart, dit l’aîné. La lettre-date " X " précise quant à elle l’année de sa création, 1775. Pour un produit aussi rare, il convenait de réaliser un support tout en finesse. La sobre silhouette élancée, assise sur un piètement tripode, répond au défi ; le choix d’un placage hélicoïdal de bois de rose pour le fût accentue l’impression de légèreté. Plus communément au nombre de deux, les triple filets aux tons contrastés encadrant des losanges sont également le signe d’une grande qualité d’exécution. L’ensemble compose un jeu de fond particulièrement en vogue à la fin de ce siècle, la "mosaïque à la reine". Cette appellation dériverait des nombreux meubles ornés de ce décor présentés par Jean-Henri Riesener à Marie-Antoinette. Deux tables de salon sont à rapprocher de notre modèle. L’une a appartenu à la collection Dubouchage, l’autre à l’Américain Ashburton. Cette dernière est aujourd’hui conservée au Philadelphia Museum of Art. De nombreux musées abritent des oeuvres de Martin Carlin, aussi l’occasion est belle pour un particulier d’acquérir cette table évoquant un art de vivre épanoui…

Auvers-sur-Oise, dimanche 13 juin.
Le Calvez & Associés SVV. Cabinet Dillée.
?Pieter Bruegel le Jeune (1564-1637/38), Paysage à la trappe aux oiseaux,
panneau de chêne parqueté, après 1616, 38 x 56,5 cm. Estimation : 300 000/400 000 €.

Du pittoresque de Bruegel à l’élégance du XVIIIe

En l’espace de deux jours, cette vacation brossera un portrait des arts décoratifs, du XIVe au XIXe siècle, en plus de 420 lots ! Les estimations suivent une large fourchette, s’échelonnant de 400 à 400 000 €. La plus haute estimation s’affiche aux cimaises, avec Pieter Bruegel le Jeune et son Paysage à la trappe aux oiseaux. Largement décliné par l’artiste, ce sujet s’inspirerait d’une oeuvre peinte en 1565 par son père Pieter Bruegel l’Ancien, conservée aux Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles. Une thèse cependant controversée. L’originalité de notre oeuvre tient à l’ajout insolite d’une scène de la fuite en Égypte, figurée sur la berge gauche de l’étendue d’eau gelée. Les touches rouges de quelques personnages, ainsi que le bleu du ciel, relèvent agréablement l’harmonie hivernale de cette composition. Le lendemain, le programme offre un bel éventail d’arts décoratifs, marqué par les réalisations du XVIIIe français. Un buste féminin en marbre blanc, sculpté par Louis-Claude Vassé en 1771, préside les enchères. Il pourrait s’agir du portait idéalisé de la marquise de Flamarens, sacrifiant tout à la fois à une composition héritée de l’Antiquité classique et à la mode du temps évoquée par sa coiffure (60 000/80 000 €). La virtuosité des artisans s’exprime également dans le bronze, avec une suite de quatre appliques à trois lumières attribuées à l’un des plus célèbres d’entre eux, Caffieri. Leurs courbes contrariées et leurs larges rinceaux feuillagés sont typiques du rocaille en vogue sous Louis XV (70 000/80 000 €). Cette exubérance est également visible sur une console en chêne couverte d’un marbre brèche rouge, attribuée à Nicolas Pineau. S’inspirant des dessins des ornemanistes, riches en cartouches fleuris, coquilles, ombilics et enroulements de feuillages ajourés, elle reproduit le motif des chimères ailées s’enroulant autour des quatre pieds puissamment cambrés (35 000/40 000 €). L’exotisme révèle une autre facette de son originalité avec une table cabaret d’époque Louis XIV, à décor de chinoiseries dorées ou laquées noir sur fond rouge, destinée à accueillir de coûteuses porcelaines pour servir le café ou le chocolat. On peut imaginer que le décor de ces pièces était à l’unisson de celui de la table... Au XVIIIe siècle, tout est dans le détail !

Neuilly-sur-Seine, lundi 7 et mardi 8 juin. Claude Aguttes SVV.
MM. Croissy, Pinta, Lebeurrier, L’Herrou, Cabinet Dillée.
?Antonio Susini (1558-1624) et son atelier, Taureau, fin XVIe-début XVIIe, épreuve en bronze ciselé, sculpté et patiné sur socle mouluré du XVIIe en placage d’ébène et filets d’étain, h. 23 cm, l. 21 cm. Estimation : 60 000/80 000 €.

Fort comme un taureau

Un port de tête altier, une démarche fière, un cou puissant en torsion et une queue battant l’air avec vigueur. Notre taureau, conquérant, a de quoi impressionner ! Dans la droite ligne des sculpteurs de la Renaissance italienne, Antonio Susini sait donner vie à une oeuvre inspirée de l’antique en la renouvelant dans un fort esprit naturaliste. Ainsi, l’une de ses créations phares n’est autre que le Taureau Farnèse, réduction du célèbre groupe romain conservé à la galerie Borghèse. Il faut dire que l’artiste fut à bonne école. Il eut comme professeur l’un des plus grands sculpteurs florentins de l’époque, Giambologna, auteur à Florence de la statue équestre de Cosme Ier de Médicis, sur la piazza della Signoria, et de L’Enlèvement des Sabines, sous la loggia dei Lanzi. Susini travailla à ses côtés de 1580 à 1600, puis ouvrit son propre atelier. C’est son maître qui l’incite à se rendre à Rome pour y apprendre les arts antiques. La relation entre les deux hommes sera faite de respect et d’admiration. Notre artiste rendra d’ailleurs hommage à son aîné en réalisant de nombreuses fontes en bronze des oeuvres du maître, à l’image de notre Taureau. Giambologna créa en 1573 - peut-être sur une commande de Cosme de Médicis - un Taureau marchant conservé au musée Bargello. Avec son neveu Giovanni Francesco, sculpteur de talent qui travaillera dans son atelier, Antonio Susini reprendra cette oeuvre à de nombreuses reprises. Un exemplaire, présenté lors de la vente Radcliffe à Londres en 1986, portait la marque des collections personnelles du roi Louis XIV. Un bronze digne des grands de ce monde !

Roubaix, lundi 7 juin.
May, Duhamel & Associés SVV. M. Parenthou.

Les Temps Forts
à Drouot Montaigne

Du 19 au 24 mai 2010


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