La Gazette Drouot
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La Gazette de l'Hôtel Drouot - Top des enchères
Top des enchères
347 208 € frais compris.
Art romain, milieu du IIIe siècle, portrait posthume de l’empereur Vespasien (69-79), bronze, h. 41 cm.
Grandeur romaine et Égypte éternelle
Victoire pour l’archéologie avec les 5 261 478 € frais compris récoltés au cours de ces deux jours de ventes. Quatre-vingt-douze enchères franchissaient le cap des 10 000 €, neuf d’entre elles dépassant celui des 100 000 €. La session la plus électrique était celle qui se déroulait lundi soir, composée d’une sélection opérée dans les stocks des galeries de Fayez Barakat situées à Londres, Beverly Hills et Abou Dabi, ce marchand désirant consacrer plus de temps à sa famille. Elle enregistrait la majeure partie des plus hauts résultats, les quatre-vingt-douze lots vendus totalisant 3 558 304 € frais compris. Sept des neuf enchères à six chiffres signalées plus haut étaient enregistrées dans la soirée ainsi que plus de la moitié, cinquante-sept, des enchères à cinq chiffres. Débutons néanmoins notre palmarès avec la session de mardi, où résonnait la plus haute enchère, 280 000 €, prononcée sur le portrait de Vespasien reproduit. Ce bronze du milieu du IIIe siècle - plus grand que nature - n’est pas contemporain de l’empereur ni de sa dynastie, celle des Flaviens, qui s’éteint en 96, avec la disparition du second de ses fils à avoir régné, Domitien. L’examen de l’intérieur de la tête révèle qu’elle a été moulée sur une plus ancienne, probablement un marbre. Ce portrait frappe par son réalisme, le visage étant marqué par des rides. Après une tête impériale, un corps de déesse, celui d’une statue acéphale de Vénus du type du Capitole. Ce marbre blanc romain à grain fin (h. 90 cm) sculpté au Ier siècle av. J.-C.-Ier siècle de notre ère recueillait 100 000 €. Il s’agit d’une réplique de la Vénus du Capitole, elle-même une copie romaine d’un modèle hellénistique du IIIe siècle av. J.-C., inspiré de l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle. Notre déesse s’en démarque néanmoins par une posture pudique plus intense, une nudité plus agressive. Changeons de civilisation, à 80 000 €, avec la cuillère "à la nageuse" du règne d’Aménophis III (vers 1390-1352 av. J.-C.). Rappelons que si les cuillères en forme de jeunes filles nageant sont bien connues, elles supportent en général un canard ou un bassin, celle-ci étant la seule connue à soutenir un ibex maîtrisé.Revenons à la soirée de lundi, largement dominée par l’art égyptien. Revenons aux enchères à six chiffres avec les 130 000 €, une estimation largement dépassée, d’un bas-relief du règne de Séthi Ier (vers 1291-1278 av. J.-C.). En calcaire, avec des restes de pigments (37 x 70 cm), il figure le souverain souriant présentant un encensoir, dont une extrémité est sculptée d’une tête de faucon. Il s’agit d’une des phases du rituel divin qu’accomplissait le roi dans les temples. Estimé au plus haut 20 000 €, un bas-relief de la XIIe dynastie (1995-1785 av. J.-C.) était propulsé à 110 000 €. En calcaire relevé de pigments (46 x 26,5 cm), il représente le fragment de deux registres, le supérieur montrant juste le pied en patte de lion d’un fauteuil, l’inférieur étant plus complet, avec une femme vêtue d’une longue robe respirant une fleur de lotus épanouie. Elle est surmontée d’une inscription hiéroglyphique. La provenance Fayez Barakat n’étant pas qu’égyptienne, mentionnons les 85 000 € d’un torse masculin romain du Ier siècle av. J.-C.-Ier siècle de notre ère en marbre blanc à grain fin (h. 61 cm), possédant des restes de polychromie – rarissime pour les marbres romains – sur la longue chlamyde rouge passant par-dessus l’épaule pour s’enrouler autour du bras gauche.
Lundi 14 et mardi 15 décembre, Drouot-Montaigne.
Pierre Bergé & Associés SVV. M. Kunicki.
614 780 € frais compris.
Lucio Fontana (1899-1968), Concetto Spaziale, Attesa forse lunedi vado a Parigi a vedere Parigi, 1966, huile sur toile, 60 x 55 cm.
Fontana, Dali, Gromaire
L’art contemporain totalisait 1 409 180 € frais compris avec en vedette les 521 000 € de l’huile sur toile lacérée de Lucio Fontana reproduite, exécutée en 1966. Si le procédé utilisé par l’artiste est archétypique de son travail, cette œuvre prend un caractère plus autobiographique par son titre, le concept spatial étant précisé ainsi : "Peut-être attendu lundi, je vais à Paris voir Paris". Une deuxième enchère à six chiffres était prononcée, 205 000 €. Elle récompensait la reconstitution de 1967 d’une oeuvre de Dalí de 1936-1937, Veston aphrodisiaque (88 x 79 x 6 cm). L’artiste a confié en 1964 à Max Clarac Serrou, de la galerie du Dragon, le soin d’éditer un veston de smoking parsemé de verres contenant une paille, créé pour l’exposition de la galerie de Charles Raton en mai 1936. L’original, disparu, avait également été présenté à l’Exposition surréaliste de Londres en juin 1936 et à la galerie Julien Levy à New York, en décembre de la même année. Les verres sont censés contenir de la liqueur de menthe, et "à l’intérieur de chaque viscosité pipperminesque une mouche morte, afin qu’au moment de la cristallisation du Pippermint les yeux paraboliques des mouches restent gravés dans un fossile atavique...", précisait le maître. Chaque épreuve du veston comporte des différences, en faisant une oeuvre unique. Plus classique, une huile sur toile de Marcel Gromaire de 1928, Nu accoudé au fauteuil rouge (81 x 65 cm), dépassait à 83 000 € son estimation. Dali considérait son veston comme le plus glorieux antécédent du pop art, un mouvement ici représenté à 59 000 € par un acrylique sur toile d’Andy Warhol de 1983, Parrot (35 x 28 cm). Les oeuvres sur papier étaient dominées par les gouaches de Calder : Triple York de 1967 atteignait 53 000 €, une deuxième, de 1970, 30 000 € et la troisième, de 1971, 25 000 €. Une étonnante sculpture-fontaine en marbre rose du Portugal de Jean-Michel Folon de 1996, La Source (h. 56 cm), l’une des quatre épreuves d’artiste, partait à 39 000 €. Elle représente un des habituels personnages à chapeau et long manteau de l’illustrateur, un bras tendu sur lequel deux oiseaux se sont posés, un autre se trouvant sur son épaule.
Lundi 14 décembre, salle 5-6 - Drouot-Richelieu.
Marc-Arthur Kohn SVV.
223 600 € frais compris.
Jean-François de Troy (1679-1752), Danaé, toile, 81 x 100 cm.
Oh, Danaé !
Une redécouverte, c’était l’une des qualités de ce tableau de Jean-François de Troy provenant par descendance de l’ancienne collection d’un chasseur de trésors artistiques émérite, le baron Joseph Vitta. L’oeuvre était adjugée 180 000 €. Avec son pendant, Le Jugement de Pâris, elle a été commandée à l’artiste dans les années 1715-1720 par un non moins célèbre collectionneur de l’époque, le banquier Pierre Crozat, notamment mécène d’Antoine Watteau. À la disparition du financier, si ses 19 000 dessins sont vendus à sa demande au profit des pauvres, ses 400 tableaux sont légués à ses trois neveux. Notre paire de toiles échoit ainsi à Louis François Crozat. Au décès de ce dernier, en 1750, sa collection est vendue aux enchères et nos de Troy gagnent la collection Lalive de Prunois. C’est sans doute là qu’ils sont séparés, chacun emporté par un membre de la famille La Live. Notre composition réapparaît en 1896, dans la vente Arsène Houssaye, à Drouot. Elle était connue, avec son pendant, par des gravures de Jean Daullé et Pierre Charles Levesque ainsi que par des versions d’atelier.
Lundi 14 décembre, Hôtel Marcel-Dassault, Artcurial - Briest - Poulain - F. Tajan SVV. Cabinet Turquin.
434 538 € frais compris.
Pierre-Auguste Renoir (1841-1919), Femme en rouge, 1912, toile, 36 x 33 cm.
Renoir au-delà de l’impressionnisme
Voici une jeune femme portant fièrement un chapeau, une assurance qui lui permettait d’attirer une enchère finale de 380 000 €, prononcée très près de la limite haute de l’estimation. Ce portrait de Renoir de 1912 se situe dans la thématique de l’exposition qui vient de fermer ses portes aux galeries nationales du Grand Palais, à savoir la période s’étendant de 1892 à la mort de l’artiste, en 1919. L’année suivant la réalisation de notre portrait, une importante exposition lui est consacrée à la galerie Bernheim-Jeune. Guillaume Apollinaire en fait ainsi l’éloge : "Renoir grandit continuellement. Les derniers tableaux sont toujours les plus beaux. Ce sont aussi les plus jeunes", et Renoir dit lui-même : "Je commence à savoir peindre. Il m’a fallu plus de cinquante ans de travail pour arriver à ce résultat, bien incomplet encore". Des avis que la postérité ne partage pas forcément, et que l’exposition a tenté de réhabiliter. Notre jeune femme possède en tout cas d’indéniables atouts, salués par les enchères.
Mercredi 16 décembre, salle 4 - Drouot-Richelieu.
Delorme, Collin du Bocage SVV. Cabinet Franc - Saint Salvy.
818 410 € frais compris.
Vasili Ivanovich Shukhaev (1887-1973), Portrait de Daria Kamenka, 1924, huile sur toile, 185 x 97,5 cm.
Des bleus de Shukhaev aux noirs de Soulages
Le score final de cette vente s’établissait à 4,5 M€, réalisés par les quatre-vingt-un numéros qui trouvaient preneur. Parmi eux, neuf égalaient ou franchissaient la barre des 100 000 €. Un peintre russe, Vasili Ivanovich Shukhaev, remportait la plus forte enchère, 660 000 € obtenus au-dessus de l’estimation par l’huile sur toile de 1924 reproduite, un Portrait de Daria Kamenka. Il s’agit d’un record français pour l’artiste et du deuxième plus haut prix enregistré au niveau mondial (source : Artnet). Le modèle de notre tableau est âgé de 17 ans. Le peintre, représentant du néoclassicisme russe, s’installe à Paris en 1921. Il réalisera des portraits, travaillera pour le théâtre de la Chauve-Souris de Nikita Balieff et dessinera des projets pour les productions d’Ida Rubinstein et des illustrations de livres. Deux résultats sont encore à noter pour la peinture russe. Estimée au plus haut 40 000 €, une huile sur toile de Sergueï Vasilkovsky (1854-1917), Scène de chasse à courre, était poussée jusqu’à 120 000 €. Une vue panoramique de Bougival par Ivan Pokitonov (1851-1924) peinte à l’huile sur panneau restait, à 100 000 €, sous son estimation. Elle a appartenu à l’ancienne collection de la fille du peintre, Zoïa. Pokitonov s’est fait une spécialité des paysages miniature. L’école impressionniste était également à l’honneur, à commencer par le peintre américain Childe Hassam (1859-1935), dont l’huile sur toile adjugée 290 000 €, Le Chemin vers la plage. La scène française était représentée à 270 000 € par un Paysage à Cagnes à l’huile sur toile de Pierre-Auguste Renoir, un artiste qui empochait également 80 000 €, avec un Coucher de soleil en automne faisant partie des études présentes à l’exposition organisée chez Bernheim-Jeune en 1931, "L’atelier de Renoir". Juste avant, 150 000 € s’affichaient sur une esquisse à l’huile sur toile de 1891, Jeune Fille cueillant des cerises (85 x 53 cm). Elle a appartenu à Ernest Rouart. Penchons-nous ensuite sur le cas de deux huiles sur toile de Moïse Kisling, qui empochaient chacune avec des sujets similaires le même résultat, 170 000 €. Il s’agit d’un Nu à la draperie rouge de 1918 et d’un autre nu, exécuté en 1936, d’un modèle devenu une célébrité, Kiki de Montparnasse. Franchissons ensuite un peu plus d’une vingtaine d’années pour découvrir, à 270 000 €, une huile sur papier marouflée sur carton de 1963 de Pierre Soulages, Composition noire (131,8 x 98,8 cm). Progressons encore dans le temps avec les 95 000 € d’une technique mixte et collage sur toile de 1994 de Burhan Dogançay, Mitterrand. Elle provient de la collection personnelle de cet artiste turco-américain. Suivant sa procédure habituelle, il a recréé un mur urbain où se détache plus particulièrement une affiche usée de la compagne présidentielle de 1981.
Mercredi 16 décembre, salle 1-7 - Drouot-Richelieu.
Claude Aguttes SVV. M. Coissard.
387 500 € frais compris. Jacques Majorelle (1886-1962), Marché à Macenta (Guinée), 1952, technique mixte sur Isorel, 78 x 107 cm.
L’exotisme, de Bugatti à Majorelle
Mâtiné d’africanisme, l’orientalisme totalisait, accompagné par de l’art de l’Islam, 1 573 625 € frais compris. La palme revenait à un habitué de ces spécialités, Jacques Majorelle, qui recueillait au coeur de l’Afrique noire 310 000 € pour la technique mixte reproduite. Le village de Macenta, situé dans les collines de la Guinée forestière, a sans doute été visité par l’artiste au cours de son deuxième séjour dans la région, entre décembre 1947 et mai 1948. Pour la veine africaine, notons encore les 22 000 € d’une huile sur toile de Suzanne Drouet Reveillaud vers 1954, Jour de fête (ou Femmes camerounaises). En 1954, cette artiste obtient le prix du Cameroun. La bourse décernée lui permettra de financer un voyage artistique, dont elle rapportera soixante-quinze dessins, gouaches et huiles exécutés sur les rives du lac Tchad. L’orientalisme était quant à lui dominé par les 82 000 €, une estimation basse doublée, d’une huile sur panneau de 1880 de Karel Ooms, Rêverie au Harem. Richement parée, une jeune femme de type occidental est alanguie sur une couche et fixe d’un air rêveur le spectateur. La douce lumière enveloppant des Caravaniers aux abords d’une ville du Levant , une huile sur toile de Théodore Frère (1814-1888), caressait à 40 000 € l’estimation basse. Pour une autre vedette de la spécialité, Étienne Dinet, retenons deux résultats : tout d’abord les 36 000 € d’une huile sur carton, Jeunes Filles et garçonnet dans la palmeraie de Bou-Saâda, puis les 30 000 € d’une huile sur panneau, Scène de rue à Bou-Saâda. La silhouette ouvragée d’un bureau de dame de Carlo Bugatti surplombait à 15 000 €, une estimation dépassée, le mobilier. En bois teinté noir incrusté d’étain et de cuivre, il possède un gradin aux côtés à degrés ouvrant par six tiroirs encadrant une niche en arc polylobé, la ceinture et son tiroir, plaqués de cuivre repoussé.
Lundi 14 et mardi 15 décembre. Salle 1-7 (lundi), salle 9 (mardi) - Drouot-Richelieu. Gros & Delettrez SVV. Mme Soustiel, MM. Achdjian, Chanoit, cabinet Vallériaux.
161 096 € frais compris.
Chu Teh-chun (né en 1920), Givre n° 50, 1960, huile sur toile, 100 x 73 cm.
Hiver complexe
Les températures négatives qui assaillaient alors la capitale justifiaient largement le titre de cette œuvre de Chu Teh-chun. Transcendé par l’artiste, le givre provoquait une bataille d’enchères qui permettait à cette toile d’atteindre 130 000 €, à partir d’une estimation haute qui ne dépassait pas 60 000 €. Elle a été peinte en 1960, année où la galerie Henriette Legendre organise la deuxième exposition monographique de l’artiste. Issu d’une famille de lettrés, il arrive à Paris en 1955 et y découvre le langage abstrait, notamment à l’occasion d’une exposition consacrée à Nicolas de Staël. À l’instar de ce dernier, notre peintre ancre toujours sa création dans l’épreuve du réel. Le titre de ce tableau donne une indication sur l’un des éléments à l’origine de sa genèse. Son processus créatif trouve aussi ses racines dans la tradition de l’empire du Milieu, notamment dans les philosophies anciennes, fondées sur les rythmes invisibles de l’univers. À l’époque Song, les artistes méditaient longuement sur la nature afin d’en restituer l’essentiel. De même, sous son apparente spontanéité désordonnée, la peinture de Chu Teh-chun cherche à révéler l’ordre profond des choses, rejoignant ainsi la théorie du chaos, qui va émerger en physique théorique dans les années 1970.
Lundi 14 décembre, salle 2 - Drouot-Richelieu.
Christophe Joron-Derem SVV. M. Vidal.
262 492 € frais compris. Sayed Hayder Raza, Hermitage, 1967, huile sur toile, 150 x 150 cm.
Raza en dix-sept toiles
Provenant d’une collection particulière, un ensemble de 17 toiles de Sayed Haider Raza, véritable pont entre la France et l’Inde, totalisait 1 660 578 € frais compris. Les estimations étaient fréquemment dépassées. Quatre huiles sur toile affichaient des scores à six chiffres, dont trois à 210 000 €. Cette enchère se répétait sur une Croix sous l’orage de 1957 avec en arrière-plan un village, sur l’Hermitage de 1967 reproduit et sur Terre nouvelle, exécutée en 1971. La dernière enchère à six chiffres, 130 000 €, s’affichait sur une huile sur toile de 1969, lumineuse et contrastée, intitulée Punjab. L’année 1965 était dignement représentée, La Grande Corniche montant à 95 000 €, poursuivie à 85 000 € par Midi-minuit, La Sambola fermant à 60 000 € la marche. Cette dernière huile sur toile était la seule à rester dans son estimation, les autres la dépassant nettement. À 45 000 €, elle était à nouveau respectée par une huile sur toile de 1960, Seine-port, où semblent s’agiter les gréements des navires à quai.
Lundi 21 décembre, salle 5 - Drouot-Richelieu.
Millon & Associés SVV, Cornette de Saint Cyr maison de ventes SVV.
360 990 € frais compris. Gustave Le Gray (1820-1884), Grande Vague. Cette n° 17 (Sète), printemps 1857, épreuve d’époque sur papier albuminé, d’après deux négatifs verre au collodion, montés sur bristol. Image : 33,9 x 41,5 cm.
La photographie ancienne plébiscitée
En 57 lots, qui trouvaient tous preneur, un ensemble de photographies totalisait 1 721 759 € frais compris, pulvérisant leurs estimations. L’essentiel provenait du peintre Romain-Étienne-Gabriel Prieur (1806-1879). Deux records mondiaux étaient recueillis et on notait un fléchissement des acheteurs américains, traditionnellement très actifs sur ce marché, face aux amateurs français et anglais. Ce sont des collectionneurs hexagonaux qui raflaient les épreuves d’époque de Gustave Le Gray les plus recherchées, notamment celle de la Grande Vague reproduite, adjugée 300 000 €. Cette image est un véritable best-seller, l’exemplaire de la collection Jammes dispersée en 1999 à Londres ayant largement contribué à la visibilité du marché de la photographie ancienne. Deux autres tirages de Le Gray empochait des enchères à six chiffres. L’épreuve sur papier albuminé du Pont du Carrousel, vu du pont Royal, Paris, vers 1859 était poussée jusqu’à 120 000 €. Elle était cependant battue à 210 000 € par une épreuve sur papier albuminé d’une autre marine, plus calme, Ciel chargé. Mer Méditerranée n° 16, printemps 1857. Pour les marines, signalons encore les 70 000 € de la Batterie de la pointe à Brest, août 1858, accompagnée d’une épreuve en mauvais état de la Rade de Brest, 1858. Les deux records mondiaux enregistrés concernaient André Giroux (1801-1879) et Léon Girard (1817-1896). Ce dernier récoltait 370 000 € avec la réunion des 26 lots, emportés par un collectionneur anglais, comportant 104 négatifs papier de vues d’Allemagne et d’Italie. Les 26 numéros, qui ne provenaient pas de Prieur mais de la descendance du photographe ont d’abord été vendus sur enchères provisoires - avec deux préemptions de l’État - pour un total de 301 300 €, finalement balayé par l’ardeur des amateurs. Giroux, un ami de Prieur, récoltait pour sa part son record avec les 140 000 € d’un ensemble de six épreuves sur papier salé vers 1855 de vues de paysages du sud-est de la France.
Vendredi 18 décembre, salle 5-6 - Drouot-Richelieu.
Jean-Marc Delvaux SVV. M. Di Maria.
105 400 € frais compris.
Gustave Eiffel (1832-1923), élément n° 16 de l’escalier hélicoïdal d’origine qui reliait le deuxième et le troisième niveau de la tour Eiffel, 1889, h. 780, diam. 170 cm.
Paris, sa tour, ses enchères !
Cette vente en forme de chant d’amour à Paris totalisait 256 912 € frais compris. De nombreux achats étaient réalisés par la Cité de l’architecture et du patrimoine, les établissements Decaux ou encore Louis Vuitton. Le symbole le plus emblématique de la Ville Lumière, la tour Eiffel, était très présent. Celle-ci récoltait d’ailleurs la plus haute enchère, 85 000 € obtenus sur la section n° 16 de l’escalier reproduite, acquise par un ferrailleur de Troyes. Rappelons que la structure hélicoïdale qui reliait les deux plateformes les plus élevées de l’édifice a été démontée au début des années 1980. Vingt-quatre morceaux étaient conservés, quatre dans des institutions, les autres étant dispersés aux enchères en 1983. Notre tronçon fait partie des plus grands. Nettement plus petits (42 x 16 cm), deux éléments boulonnés de la structure de la tour, estampés "Grands travaux tour Eiffel 1981-1983" et "Fer d’origine 1889", trouvaient pour leur part preneur à 1 700 et 1 800 €. Concernant les représentations de la dame de fer, retenons les 4 000 € d’une maquette en bois de deux tons (h. 90 cm), dont les plateformes sont animées de drapeaux tricolores en plomb, les arches portant la date de 1889, et les 2 450 € d’une maquette de 1889 de l’Usine métallurgique parisienne, en laiton découpé. Cette entreprise, située à Levallois-Perret, appartenait à Gustave Eiffel. Le métro parisien s’offrait un ticket de première, à 18 000 €, avec une paire de banquettes de voiture de seconde classe de la fin du XIXe, début du XXe siècle. Elle était estimée 500 € seulement. Chantés par Gainsbourg, les poinçonneurs disparus du métro parisien recevaient un nouvel hommage avec les 500 € de la poinçonneuse en aluminium. Pour le mobilier urbain, signalons encore les 2 700 € d’une vespasienne de la capitale d’époque Napoléon III, en fer et fonte laqué vert (265 x 157 x 249 cm). Sa vocation ne l’empêchait pas d’avoir un certain style, puisque le kiosque central quadrangulaire est flanqué de colonnes à chapiteaux corinthiens. Paris a toujours inspiré les peintres, l’image la plus recherchée ici étant, à 11 000 €, une huile sur toile vers 1880 de Gustave Mascart, La Seine, port des Célestins à la tombée du jour, qui permet de ne pas oublier que le fleuve, avant d’être un axe touristique, était avant tout voué au commerce.
Lundi 14 décembre, salle 15 - Drouot-Richelieu.
Lucien-Paris SVV.
124 996 € frais compris. Remus Botar Botarro (né en 1946), L’Esprit de rêve, 2001, bronze à patine dorée polie numéroté 1/3, h. 70 cm.
En fanfare
À 100 000 €, l’estimation était dépassée pour l’une des trois épreuves en bronze à patine dorée de L’Esprit de rêve, une œuvre de Remus Botar Botarro. Elle est la seule création de cet artiste enregistrée sur la base de données Artnet, détenant de facto un record mondial. Cet artiste français d’origine roumaine fait en tout cas une entrée en fanfare sur la scène des enchères. Il est connu pour avoir réalisé une douzaine de monuments publics à Paris, Budapest, Bucarest, Sinaia, Sighisoara et en Autriche, souvent dédiés à des soldats, pour lesquels il a reçu de nombreux prix et distinctions. Certains vont même jusqu’à le présenter comme le successeur d’un autre sculpteur roumain, Français d’adoption lui aussi, Constantin Brancusi. Botarro a plus d’une corde à son arc puisqu’il est également expert en restauration d’oeuvres d’art.
Lundi 21 décembre, salle 5 - Drouot-Richelieu. Millon & Associés SVV, Cornette de Saint Cyr maison de ventes SVV.
228 600 € frais compris. Chine, époque Qianlong (1736-1795), boîte en bronze doré en forme de melon à huit lobes, diam. 36 cm.
Chine, XVIIIe siècle
On a davantage l’habitude de voir ce type de boîte chinoise en forme de melon déclinée en laque de cinabre plutôt qu’en bronze doré. Une spécificité qui a participé aux 190 000 € décrochés par notre exemplaire, à plus du triple de l’estimation haute. Autre élément ayant joué un rôle dans la valorisation de l’objet, la présence au centre de la base de la marque de Qianlong à quatre caractères zhuanshu, inscrite dans un carré. Enfin, le décor est particulièrement soigné. Rappelons que la poignée, en forme de queue tirebouchonnée, est entourée des huit emblèmes bouddhiques, auxquels succèdent des scènes de jeux d’enfants, également reprises sur la partie inférieure, parsemée sous différentes formes du caractère "shou", synonyme de longévité.
Jeudi 17 décembre, Espace Tajan. Tajan SVV.
Mme Papillon d’Alton, M. Ansas.
149 200 € frais compris. Chine, époque Daoguang (1821-1850), vase-balustre en porcelaine blanche décorée en émaux polychromes et émail or, marque Daoguang au revers en rouge de fer, h. 31,5 cm.
Chine, XIXe siècle
On a coutume de voir s’envoler vers des sommets les porcelaines chinoises du XVIIIe siècle... Celle-ci date de la première moitié du XIXe siècle et suivait le chemin de ses illustres devancières en atteignant 120 000 €, à partir d’une estimation haute de 15 000 €. Elle est d’époque Daoguang, comme en atteste la marque qu’elle porte au revers de sa base émaillée bleu turquoise. Fils et successeur de Jiaqiong, Daoguang est le huitième empereur de la dynastie des Qing. Il prend le pouvoir d’un Empire déclinant et tentera d’endiguer le trafic de drogue organisé par les Anglais. En 1839, la guerre de l’Opium éclate et ravage durant quatre ans le pays. Le traité de Nankin, signé en août 1842, octroie de nombreux avantages aux Britanniques. Cette perte de puissance de l’Empire chinois n’empêchera pas la production de porcelaines de grande finesse, comme en témoigne notre vase. Certaines pièces impériales sont même d’une telle qualité qu’elles égalent les productions faites sous Yongzheng (1722-1735), où s’épanouit la famille rose. Les décors doucai de cette période ne sont pas les seuls à avoir la faveur de Daoguang, les imitations de bleu et blanc d’époque Khangi étant également prisées.
Mardi 15 décembre, Hôtel Marcel-Dassault.
Artcurial - Briest - Poulain - F. Tajan SVV. M. Portier.
123 920 € frais compris.
Chine, époque Qianlong (1736-1795), sceptre ruyi en jade, l. 48 cm.
Sceptre impérial
L’inscription d’offrande subtilement gravée sur le revers de son manche n’est sans doute pas étrangère aux 100 000 € que ce sceptre en jade néphrite blanc céladonné veiné de rouille et brun a obtenus, sur une estimation qui n’en excédait pas 80 000. Elle indique qu’il s’agit d’un cadeau du fonctionnaire Xu Fengan Zhu à destination de l’empereur. Le manche est sculpté en bas relief d’un tronc sinueux portant des citrons digités, avec à ses pieds des iris d’eau. La tête présente une chauve-souris auprès d’un bambou et d’une branche de pêcher chargée de fruits, soit les symboles du bonheur, de la richesse, de la longévité et de l’immortalité. Que souhaiter de mieux en ce début d’année ?
Mercredi 16 décembre, salle 11 - Drouot-Richelieu. Blanchet & Associés SVV. Mme Papillon d’Alton, M. Ansas.
118 964 € frais compris.
Jehan Froissart (1337-1404), Istoire du voiage de Jehan de Bourgogne en Turquie, in-4o en langue française, soit 78 feuillets sur papier vergé, fin XIVe-début du XVe siècle, reliure de plein veau brun.
Un original de Froissart
À 96 000 €, l’estimation était respectée pour ce manuscrit, rédigé par le célèbre historien Jehan de Froissart, présentant la version originale de l’histoire du voyage de Jehan de Bourgogne en Turquie, à l’occasion de la croisade de Nicopolis, en 1396. Il a sans doute été rédigé à l’attention de Jean de Bruges, chambellan du duc de Bourgogne, le fastueux Philippe le Hardi. Seuls deux autres exemplaires de ce texte sont répertoriés. Datant tous deux du XVe siècle, l’un est conservé à la Bibliothèque nationale et l’autre appartenait à l’ancienne collection de lord Ashburham. Notre version originale témoigne de l’état du texte avant les nombreuses modifications qu’il a subies pour son inclusion dans les Chroniques de Froissart. Composé de six chapitres, le manuscrit est orné de sept lettrines polychromes et de quarante-sept lettrines monochromes. Son illustration est redevable aux ateliers établis ou favorisés par le duc de Bourgogne sur ses terres, qu’elles soient françaises ou flamandes. Il a appartenu au XVe siècle au prince de Steenhuyse, le plus grand bibliophile bourguignon.
Mardi 22 décembre, Drouot-Montaigne.
Lafon Castandet - Maison de Ventes SVV. M. Roch de Coligny.
266 900 € frais compris.
Honoré de Balzac (1799-1850), Le Lys dans la vallée, Paris, Werdet, 1er juin 1836. Deux volumes in-8o, demi-veau de l’époque, édition originale avec envoi de l’auteur à la marquise de Castrie (1796-1861).
Belle marquise...
Il suffit de peu pour qu’une édition originale parmi d’autres se transforme en un exemplaire unique et fort convoité. Les quelques mots tracés par Balzac – «À madame la marquise de Castries, l’auteur» – suivis de sa signature sur les deux volumes du Lys dans la vallée reproduits opéraient un prodige, transformant une estimation de 30 000 € en une adjudication de 220 000 €. Le prix d’une histoire d’amour jamais assouvie du romancier pour une noble dame, aussi belle que scandaleuse. Lorsque Balzac la rencontre en 1832, la fille du duc de Maillé a déjà une histoire mouvementée derrière elle. Son mariage avec Edmond de La Croix de Castries ayant été un échec, elle s’éprend de Victor de Metternich, fils du chancelier autrichien, et lui donne en 1827 un fils, Roger, anobli par l’empereur d’Autriche. 1829 est une année maudite, une chute de cheval la rendant infirme, tandis que son amant meurt de la tuberculose. Sa beauté étant restée intacte, elle séduit Balzac, mais l’abandonne sèchement. Celui se vengera en écrivant en 1833 La Duchesse de Langeais. Au moment où il lui dédicace notre ouvrage, leur relation est apaisée et l’écrivain de nouveau reçu dans son salon, l’un des plus renommés de Paris.
Mercredi 16 décembre, Hôtel Marcel Dassault. Artcurial - Briest - Poulain - F. Tajan SVV. M. Corcelle.
115 245 € frais compris.
Adam Weisweiler (1744-1820), époque Louis XVI, secrétaire de dame en cabinet, placage de citronnier marqueté, plaques de porcelaine surdécorées postérieurement, bronzes ciselés et dorés, 121 x 69 x 35,5 cm.
Secrétaire en cabinet
Raffiné et délicat sont les qualificatifs qui viennent naturellement à l’esprit pour désigner les accords blond, or et fraîchement polychromes de ce secrétaire de dame d’Adam Weisweiler, d’un type particulier. Il charmait un enchérisseur à hauteur de 93 000 €. Sa typologie, croisant le secrétaire à abattant du XVIIIe et le cabinet du siècle précédent, apparaît à la fin des années 1770 ou au tout début de la décennie suivante, probablement sous l’impulsion de Dominique Daguerre, le célèbre marchand-mercier à l’origine de plusieurs innovations pour le mobilier à la fin de la Monarchie. Il a notamment confié à Weisweiler le soin de réaliser ces meubles originaux, dont le caractère rare et précieux est accentué par l’utilisation de panneaux de laque, de plaques de Wedgwood ou de porcelaine. Plusieurs grands musées - Le Getty de Los Angeles, le Metropolitan de New York, l’Ermitage à Saint-Pétersbourg pour n’en citer que quelques-uns - possèdent des exemplaires, qui tous se singularisent par leur luxe, destiné à séduire les grands amateurs de l’époque, aussi bien français qu’européens.
Mercredi 16 décembre, salle 5-6 - Drouot-Richelieu.
Piasa SVV, M. Dillée.
77 548 € frais compris.
Jean-Baptiste Claude Sené (1747-1803), époque Louis XVI, chaise en hêtre sculpté et doré.
Par Sené pour Madame Élisabeth
L’estimation modeste de cette luxueuse réalisation de Sené, 10 000 à 12 000 €, prenait en compte une transformation importante affectant son dossier, cette chaise étant à l’origine une voyeuse à genoux permettant d’observer les joueurs. Nonobstant ce défaut, les enchérisseurs la poussaient jusqu’à 62 000 €. L’exceptionnelle qualité de sa sculpture et ses pieds à cannelures torses sont des indices d’un pedigree de choix. Elle faisait en effet partie du mobilier livré en 1789 pour le salon de compagnie de Madame Élisabeth au château de Montreuil à Versailles. Cette demeure est acquise en mai 1783 par Louis XVI pour en faire la résidence de sa soeur, après la faillite du prince et de la princesse de Guéméné. Quatre voyeuses à genoux ont été livrées, deux à dossier garni et deux à dossier ajouré, ces dernières étant conservées dans la collection Templewood. Inutile de préciser que Madame Elisabeth a peu profité de ce somptueux ensemble...
Mercredi 16 décembre, Espace Tajan.
Tajan SVV.
124 004 € frais compris.
Fin de l’époque Louis XVI, début du XIXe siècle, secrétaire à abattant en acajou et placage d’acajou à ramages orné de bronze ciselé et doré, dont un médaillon représentant Louis XIV et la reine Marie-Thérèse.
Ancien Régime
Ce luxueux secrétaire néoclassique doublait à 100 000 € son estimation. Il ruisselle littéralement d’une riche ornementation de bronze doré dont l’élément le plus original est le médaillon ornant l’abattant, présentant les profils de Louis XIV et de sa royale épouse, Marie-Thérèse. Il témoigne de la persistance, dans le premier quart du XIXe siècle, du goût pour la curiosité et l’évocation de l’Ancien Régime. Il figurait en effet en 1824 dans la vente après décès du fonds de commerce du marchand-mercier parisien Philippe Claude Maëlrondt. Ce dernier a activement participé au retour de l’attrait pour le XVIIIe, aussi bien en France qu’au-delà de nos frontières. Il a en effet entretenu des rapports étroits avec le marché anglais, notamment en travaillant avec le grand marchand Fogg, fournisseur du roi Charles IV. Il était réputé auprès des collectionneurs pour l’originalité et la qualité des meubles qu’il présentait, parmi lesquelles des créations de Boulle et Riesener.
Lundi 21 décembre, salle 1-7 - Drouot-Richelieu. Pierre Bergé & Associés SVV. Mme de La Chevardière, M. de L’Espée.
194 448 € frais compris. Attribuée à Jean Avisse, époque Louis XV, paire de fauteuils à châssis en hêtre mouluré et sculpté.
Avisse, Lannuier, Marcion...
Le programme classique de cette vente faisant la part belle au mobilier totalisait 1 066 800 € frais compris (82,96 % en lots - 80 % en valeur). À 160 000 €, l’estimation basse était doublée pour la large paire de fauteuils reproduite, attribuée à Jean Avisse. C’est par analogie avec un mobilier conservé au Getty Museum que l’attribution a été faite. Elle provient de la collection de Louis Renault, avenue Foch à Paris, et appartient à une série de dix fauteuils connus. La seconde enchère à six chiffres, 141 000 €, revenait au-dessus de son estimation à une commode à ressaut d’époque Louis XVI estampillée de Nicolas-Louis Lannuier. Ouvrant par cinq tiroirs sur trois rangs dont deux sans traverse, elle est en placage de satiné et filets d’amarante et d’ébène, relevé d’une riche ornementation de bronzes dorés. Ses montants antérieurs sont à pans et arrière en ressaut, ses pieds étant légèrement cambrés, le plateau en marbre brocatelle d’Espagne. L’estampille de Lannuier est rarissime, mais toujours associée à des meubles de grande qualité. Il était marchand de meubles avant d’être ébéniste, sa maîtrise datant de 1783. À 30 500 €, l’estimation était triplée pour une coiffeuse d’époque Louis XVI en placage d’ébène encadrant des panneaux de laque du Japon à paysages or sur fond noir. Elle est soulignée de bronze doré et ses pieds gaine sont placés dans l’axe des pans coupés de la ceinture. Elle ouvre par un plateau en marbre brocatelle dévoilant un miroir mobile et un lutrin encadré par deux casiers en placage de satiné. À 21 500 €, l’estimation était triplée pour un mobilier de salon d’époque Empire de Pierre-Benoît Marcion en hêtre doré et sculpté, comprenant une paire de bergères et une paire de fauteuils. Les montants antérieurs sont en carquois.
Vendredi 18 décembre, salle 10 - Drouot-Richelieu. Beaussant - Lefèvre SVV. MM. Auguier, Bacot, de Lencquesaing.
161 205 € frais compris.
Louis-François Aubert (reçu maître en 1748), Paris avant 1750, tabatière à monture cage en or sur fond plaqué de nacre de différents tons, poids. 177,3 g, 3,3 x 7,5 x 5,5 cm.
Précieuse collection !
Émaillée de quelques montres, la première partie d’une collection de boîtes et tabatières provoquait un vif intérêt. Les 44 lots vendus totalisaient 1 033 685 € frais compris, deux enchères à six chiffres et 24 à cinq chiffres étant prononcées. La palme revenait à 130 000 € à la précieuse tabatière reproduite, réalisée dans les deux ans suivant l’obtention de la maîtrise par son créateur, Aubert. Celui-ci a été l’apprenti de François Marteau, dont une boîte similaire à la nôtre est conservée au musée du Louvre. Réalisée par l’un des plus éminents orfèvres de son époque, Jean Joseph Barrière, une tabatière ovale à monture cage en ors (Paris 1776), les panneaux ornés de paysages marins en ors sur fond émaillé bleu, était poussée jusqu’à 105 000 €. À 32 000 €, l’estimation était doublée pour une tabatière d’Adrien-Jean-Maximilien Vachette à monture cage en or (Paris 1785-1789). À couvercle et fond en laque noir du Japon à décor or d’architecture et de feuilles de ginkgo, les côtés en mosaïque de laque noir et nacre burgau. Elle est rectangulaire à pans coupés. La plus belle envolée de la vente concernait à 38 000 € une boîte de Gabriel Marguerit, estimée pas plus de 8 000 €. En or (42 g - Paris 1809-1819), ses côtés sont émaillés de pastilles et filets bleus sur fond de vannerie, le couvercle portant sur un fond de murailles et arbre un camée de Pitrucci, sur sardonyx, représentant une jeune femme au chignon. Pour les garde-temps, 50 000 € s’affichaient sur une paire de montres de poche en or émaillé, travail suisse des années 1810 pour le marché chinois. Elle présentent chacune une grande miniature émaillée, dont la qualité se situe dans la lignée de Philippe Samuel Meylan. L’une montre des couples de pêcheurs dans un paysage d’architecture avec pont, l’autre figurant un port animé de personnages. Les mouvements en laiton sont entièrement ciselés de rinceaux d’une signature chinoise.
Lundi 21 décembre, salle 1-7 - Drouot-Richelieu.
Pierre Bergé & Associés SVV. M. Salit.
1 750 000 € frais compris. École autrichienne vers 1640, série de quatre toiles dont Audience de congé de l’ambassadeur extraordinaire Hans Ludwig von Kuefsteindans la salle du conseil du palais de Topkapi, 24 juillet 1629, 127,5 x 185,5 cm.
De sublimissimes turqueries
La suite de quatre toiles relatant l’ambassade d’Hans Ludwig von Kuefstein tenait largement ses promesses. Annoncée autour de 250 000 €, elle était vivement bataillée entre de nombreux amateurs du Golfe et des clients turcs présents dans la salle et au téléphone. Témoignage historique, elle évoque le cérémonial et les pompes de la Sublime Porte que divers peintres représenteront aussi fastueusement au XVIIIe siècle, le plus connu étant sans aucun doute Jean-Baptiste Van Mour. Après une lutte acharnée d’enchères, notre série multipliait par huit les estimations, finalement décrochée par un collectionneur turc. Pour les autres tableaux, mentionnons les 11 000 € déboursés pour décrocher Caprice d’éléments archéologiques antiques, un dessin au lavis bleu à l’imitation du lapis-lazuli par Jean-Guillaume Moitte. Les Anges du Jugement dernier, un panneau de l’école catalane du début du XVIe, s’élevait à 38 200 €. 27 000 € s’inscrivaient sur un Vase de tulipes, roses et autres fleurs, une toile attribuée à Cornelis Kick et La Leçon d’équitation, une toile cette fois attribuée à Jan Peeter Verdussen, trouvait amateur à 43 000 €. Succédaient des tableaux signés de peintres modernes et contemporains : il fallait prévoir 11 000 € pour emporter Bord de mer, une toile vers 1905. Provenant d’une collection particulière marseillaise, elle est l’œuvre d’Alfred Lombard. On engageait encore 27 000 € sur Nature morte aux agrumes, une toile signée René Seyssaud et également signée de ce peintre, une toile montrant les Laboureurs s’élevait à 24 600 €. Quant à Niki de Saint Phalle, elle suscitait une enchère de 35 700 € avec une sculpture en résine peinte. Représentant Le Taureau, elle date de 1990 et porte le cachet de Robert Haligon.
Marseille, samedi 19 décembre. Damien Leclere Maison de ventes aux enchères SVV. M. Millet
A LA UNE
José Nicolas (né en 1956), Révolution roumaine, le 23 décembre 1989, tirage argentique 1/8, 80 x 60 cm.
Estimation : 1 000/1 200 €.
A la une : vive le photojournalisme !
Au tout début de l’année 1989, le dixième panchen-lama tibétain meurt dans des conditions mystérieuses, causant une effervescence condamnée par les autorités chinoises. George H. Bush est élu président des États-Unis et Akihito succède à son père, Hirohito, sur le trône du Japon. Le 15 avril, à la mort de Hu Yaobang, des étudiants se réunissent sur la place Tian’anmen et la demande de libéralisation du régime gagne les grandes villes chinoises. Le 4 juin, ce mouvement spontané est durement réprimé par l’armée. En France, on se préoccupe de fêter le bicentenaire de la Révolution. Les premières fissures apparaissent dans les pays du bloc de l’Est, qui aboutissent le 9 novembre à la chute du mur de Berlin et à la réunification de l’Allemagne. En Afrique du Sud, le régime de l’apartheid vit ses dernières heures. Une année au bilan mitigé, qui s’achève en Roumanie dans le sang. Ayant causé des milliers de blessés et plus de mille morts, la révolution se termine avec le procès fantoche des époux Ceausescu - et leur exécution. Ce pays aurait d’ailleurs pu connaître une situation plus dramatique encore, si son armée n’avait pas finalement pactisé avec les manifestants. Les évènements ont été relayés par les médias, en particulier les journalistes envoyés sur place, comme José Nicolas, photographe pour l’agence SIPA, qui commente ainsi cette prise de vue : "Le 23 décembre 1989, tandis que Ceausescu s’enfuit précipitamment en hélicoptère du bâtiment du Comité central, les manifestants envahissent l’édifice et s’attaquent ensuite à la chaîne de télévision publique. Le chaos s’installe à Bucarest, jusqu’au soir du 25 décembre, date à laquelle les époux Ceausescu seront jugés et condamnés à mort par un tribunal militaire." José Nicolas est né à Casablanca en 1956. Il intègre les commandos de parachutistes et, lors de ses missions, s’intéresse au travail des photographes au point de décider d’en faire son métier. Il rencontre Bernard Kouchner et suit Médecins sans frontières pendant quelques années, avant de rejoindre en 1984 l’équipe de l’agence SIPA, créée à l’initiative de Göksin Sipahioglu. Pendant près de onze ans, il va couvrir de nombreux conflits : Roumanie, Bosnie, Tchad, Liban, Afghanistan, guerre Iran-Irak, Somalie, Rwanda, où il est gravement blessé en 1994. Désormais photographe indépendant, il s’est installé dans le sud de la France et traite de sujets nettement plus pacifiques. En effet, le photojournaliste s’apparente le plus souvent à un correspondant de guerre ou bien est envoyé sur les lieux de catastrophes. "Montrer que des populations ont la guerre pour seul paysage", telle est la définition de Patrick Chauvel. Sans oublier que, derrière l’objectif, un être humain permet au lecteur ou au visiteur d’une exposition d’en partager la réalité.
Marseille. Samedi 16 janvier.
Damien Leclere SVV.

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