La Gazette Drouot
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L'agenda de la semaine
L'agenda des ventes aux enchères
Francesco Guardi (1712-1793). Piazza San Marco con basilica e campanile, toile, 34,5 x 48 cm. Estimation :
400 000/600 000 €.

À la une : Venise par Francesco Guardi
Venise, ses canaux, ses gondoliers, la place Saint-Marc... la ville des voyages de noces est le nec plus ultra touristique. Déjà, au siècle des Lumières, la Sérénissime était une étape obligée du grand tour, périple éducatif des jeunes aristocrates, en particulier britanniques. Il convenait alors de rapporter des oeuvres d’art pour montrer la finesse de son goût. Des tableaux anciens à Florence, des antiquités et des vues de lieux célèbres à Rome bien sûr, mais aussi à Naples et, surtout, à Venise. D’abord peintre de décors de théâtre, le Vénitien Canaletto découvre à Rome les endroits précis peints par Vanvitelli. De retour dans sa ville, il va s’attacher à en reproduire les sites célèbres : le palais des Doges, la Piazzetta, la place Saint-Marc et sa basilique byzantine, le Grand Canal, la lagune... Véritable carte postale, sa peinture quasi topographique connaît un succès immédiat auprès des riches Anglais. Mais bientôt, en raison des guerres qui ensanglantent l’Europe, les touristes se font rares, tarissant une source importante de revenus. Canaletto n’hésite pas à s’installer à Londres, où il restera de 1746 à 1758. De retour à Venise, il ne retrouve pas sa place, le style de Francesco Guardi, plus romantique, plus vif, ayant désormais les faveurs des Vénitiens. Fils de peintre, Guardi travaille dans l’atelier familial avec son frère Antonio, se spécialisant dans la peinture de figures. À la mort de celui-ci, en 1761, il prend la tête de l’entreprise et se consacre, déjà agé de cinquante ans, à une carrière de védutiste. Selon Pietro Gradenigo dans ses Notari de 1764, il aurait été l’élève de Canaletto, mais sa manière est plus libre et, probablement grâce à l’influence de Tiepolo, son beau-frère, il développe une sensibilité extrême à l’atmosphère et à l’harmonie des couleurs. Ses premières oeuvres baignent dans une ambiance argentée, limpide. L’artiste prête une attention particulière aux ciels nuageux, notamment dans ses paysages de la lagune, rythmés d’embarcations sur lesquelles s’activent des figures colorées peintes d’une brosse rapide et incisive. Souvent de format imposant, ses tableaux se font dans les décennies suivantes plus petits. Sa palette, après avoir usé d’un éclairage dramatique et de teintes sourdes, adopte une gamme plus claire et se fait légère. Les coloris francs ponctuent la ligne ondulante de ses figures, qui "vivent donc et sont rassemblées dans un contour qui joue un rôle déterminant, [...] les amples manteaux, les andriennes, les masques, concourent à faire disparaître les extrémités, à isoler les petites masses humaines, psychologiquement inertes", écrit Edoardo Arslan en 1944. Le peintre met en valeur l’ombre et la lumière, ses personnages semblent flotter dans un jeu tout en nuances. La place Saint-Marc, haut lieu du pouvoir à Venise, coeur même de la cité, a retenu particulièrement son attention. On connaît une vingtaine de variations sur le sujet. Pour notre toile, Guardi met l’accent sur les Porcuratie Nuove, le campanile et la basilique, et attire le regard vers la tache rouge de l’habit du promeneur en grande conversation. Grâce à la magie de sa touche, tout palpite. Paysage bien réel, mais tellement empreint de poésie qu’il se rapproche de ses "caprices", autre part importante de son oeuvre.
Paris, Drouot-Richelieu, salle 5-6. Mercredi 18 novembre.
Blanchet & Associés SVV. Mme Mauduit, M. Turquin.
Georges Mathieu (né en 1921), Renier IV. Comte de Mons et de Hainaut, 1954, huile sur toile, 93 x 126 cm.
Estimation : 60 000/80 000 €.

Mathieu, héraut de la primauté du geste
Il est contre tout ce qui corsète, limite et enferme. En d’autres temps, peut-être eût-il été mousquetaire. Oui, on peut sans peine aussi imaginer Georges Mathieu en croisé valeureux et intrépide, en chevalier sans peur et sans reproche. Sa suite des tableaux de 1954 ne sonne-t-elle pas comme une déclaration de guerre ? La Bataille de Bouvines, Les Capétiens partout, mais aussi notre Renier IV. Comte de Mons et de Hainaut, où les bruits et les couleurs des chocs des armées se traduisent en zébrures, traits fulgurants qui griffent et animent la surface de la toile. Boulonnais, comme Godefroy de  Bouillon, et issu du côté maternel de la lignée de Baudouin de Boulogne, frère dudit Godefroy, Mathieu se passionne pour l’histoire de France au point de porter "constamment un petit carnet où figuraient tous les Capétiens directs avec leurs dates de règnes". Il frémit au rythme de l’aventure de la monarchie française, pour le tout petit territoire qu’Hugues Capet doit défendre contre les barons et autres vassaux. Ce souffle d’expansion se retrouve dans son geste créateur. Spiritus intus allit, soit l’esprit se vivifie de l’intérieur ; il aime citer cette pensée de saint Augustin, qu’il associe dans la même phrase à l’abstraction lyrique. "Par ces mots, saint Augustin entrevoit la création libre, l’essence même de l’art et j’ajouterais la vie", lit-il à l’occasion de son installation comme membre de la section Peinture à l’Académie des beaux-arts. Son oeuvre est signe avant d’être signifiante. Mathieu renoue avec le geste, d’essence sacré, des peintres néolithiques qui, dans le noir sur les murs de cavernes, traçaient inspirés et d’instinct des formes, certes figuratives. Sur un fond terre de Sienne brûlée - recouvrant des premiers signes effacés et grattés, dont les traces participent à la genèse de l’oeuvre - explosent des lignes chargées de peinture, de l’ocre jaune clair et du jaune de cadmium, ancrées dans "cet à-plat unique, comme un soc de charrue fouillant la terre". Ainsi, la fulgurance de son geste provoque cette émotion, ce mystère qui tissent le dialogue entre l’oeuvre et le spectateur. Dandy et gourmet, l’artiste savoure les énigmes de ses peintures, lui qui se définit ainsi : "J’aime le peuple et je fuis la foule comme Robespierre, je suis marqué par la griffe uranienne qui érotise l’angoisse fatale à ma fureur de vivre, et je partage le destin schizoïdien du roi Charles V, exemplairement sage." Combattant tous les conservatismes, les icônes formatées et l’abstraction géométrique abhorrée, héraut (et héros) ambigu et déroutant, Georges Mathieu ne croit en fait que dans la beauté du geste.
Vendredi 13 novembre, salle 1 - Drouot-Richelieu.
Ader SVV. Mme Sevestre-Barbé, M. de Louvencourt.
Édouard Denis Baldus (1813-1889), L’Amphithéâtre romain de Nîmes, 1853, tirage d’époque sur papier salé d’après négatif papier, monté sur carton, 33,7 x 43,2 cm. Estimation : 10 000/15 000 €.

Pérégrinations photographiques
Le Japon, Angkor, Valparaiso, l’Europe centrale, la Suisse, Venise, les bords de la Loire, Mulhouse, Grenoble, Amiens... Les candidats à l’évasion, comme les amateurs de photographies, auront l’embarras du choix. Une soixantaine de numéros, alternant clichés et albums de planches, propose autant d’escales d’un voyage au long cours. La plus marquante, toutefois, pourrait avoir lieu à Nîmes avec une vue de l’amphithéâtre romain d’Édouard Denis Baldus en 1853, un tirage d’époque sur papier salé. 10 000/15 000 € sont attendus pour cet édifice bâti à la fin du Ier siècle pour divertir la population, devenu village fortifié et refuge pour les habitants lors des grandes invasions et quartier commerçant avec ses rues et ses boutiques du Moyen Age au XIXe siècle. Notre photo fait partie du "grand tour" entrepris par Baldus en 1851 dans le cadre de la Mission héliographique, consistant à fixer sur papier les monuments antiques et anciens de Bourgogne, Dauphiné et de Provence. Cap au sud toujours, mais cette fois de l’autre côté des Alpes, avec un ensemble de vues de Rome d’Eugène Constant et de James Anderson. Au final, une quinzaine de photographies des principaux monuments antiques de la Ville éternelle, colligées par un voyageur dans les années 1850-1860. Nous passons ainsi sous l’arc triomphal de Constantin, devant le Colisée, découvrons le temple de Vénus, franchissons la voie menant de l’arc de Titus vers le forum romain. Après la basilique ulpienne, la colonne trajane et la fontaine des Dioscures, voici les temples d’Hercule vainqueur et de Portunus, les rives du Tibre, puis le château Saint-Ange et la coupole de Saint-Pierre se détachant dans le fond. Sans oublier un petit détour par la galerie des philosophes, et un face-à-face avec l’effigie en pierre de Moïse, due à Michel-Ange. Contemporains des prises de vue, nos tirages, livrés en bon état de conservation, pourraient trouver preneur entre 1 000 et 3 000 €. Dire que de l’Italie à l’Égypte il n’y a qu’un pas serait présomptueux, sauf... quand il s’agit de photos. Deux vues du milieu du XIXe siècle, l’une du Temple de Karnak, du l’autre du Temple de Komumboo, dans le Sinaï prennent ainsi le chemin des enchères. La première (1 500/2 000 €) est l’œuvre de John Beasley Greene (1822-1856), fils de banquier américain qui consacra sa courte existence à l’archéologie égyptienne et à la photographie des paysages, sculptures et inscriptions, au fil du Nil. La seconde (même estimation) est due à Maxime du Camp, fils d’un chirurgien réputé dont la fortune lui permit de satisfaire son goût très vif pour les voyages, accompagnant Gustave Flaubert et Auguste Salzmann en Égypte, en Palestine, en Syrie, en Asie Mineure, en Grèce et en Italie...
Lundi 9 novembre, salle 4 - Drouot-Richelieu. Lafon SVV.
Mme Esders, M. Roch de Coligny.
Japon, XIXe siècle, signé Kôkei. Netsuke en bois représentant un enfant coiffé d’un grand chapeau, allongé sur le dos d’un buffle au repos, l. : 4,2 cm.
Estimation : 1 500/2 000 €.

Sous le signe du buffle
Si ce quadrupède est décrit dans le calendrier zodiacal chinois comme un animal dictatorial, déterminé et insoumis, rien n’indique qu’il porte la même symbolique dans le bestiaire japonais. Le nôtre, d’ailleurs, semble bien conciliant, voire légèrement apeuré, avec sa charge sur le dos... De taille et de forme classiques, agréable au toucher comme il se doit, cet objet a le mérite d’être signé, mais surtout d’être sculpté d’un motif original et séduisant. L’imagination des sculpteurs - également parfois peintres, graveurs sur métal, orfèvres, céramistes ou facteurs de tsuba - ne connaît pas de limites, et plus de 3 000 auteurs de netsuke sont répertoriés. Il faut dire que d’accessoire, ce petit objet surtout utilisé par ces messieurs devient dès le XVIe siècle indispensable, puisque destiné à retenir dans la ceinture le cordonnet attachant un inro, un nécessaire à fumer ou à écrire, une blague à tabac ou une bourse. Assez peu prisés en tant qu’objets d’art avant l’ère Meiji (1868-1912), les netsuke sont redécouverts par les Européens, qui commencent à les collectionner. Nombreux sont ainsi les sculpteurs et artisans se mettant à en fabriquer pour cette nouvelle clientèle, mais aussi pour les Japonais, aux vêtements désormais munis de poches, qui n’en avaient plus besoin, si ce n’est pour le plaisir. Autre époque, autres mœurs.
Jeudi 12 novembre, hôtel des ventes Favart.
Deburaux & Associés Françoise SVV. Mme Papillon d’Alton, M. Ansas.
Jean Burkhalter (1895-1982), Maternité au bord de l’eau, huile sur toile, 88 x 116 cm. Estimation : 5 000/6 000 €.

Atelier Jean Burkhalter
"Luxe, calme et volupté"... pourrait-on dire devant cette large composition exécutée en 1929. Peintre dont les oeuvres sont régulièrement saluées dans des expositions – notamment dans sa ville natale d’Auxerre –, notre homme fait également oeuvre d’architecte urbaniste avec les frères Martel, réalise des affiches de films aux côtés de Djo-Bourgeois, crée des modèles de tapis pour Robert Mallet-Stevens et Pierre Chareau ou exécute encore le décor de vases et de services de vaisselle pour la manufacture de Sèvres. Sans oublier l’activité, de 1946 à 1960, de directeur de l’école d’art décoratif et du musée de la Céramique à Limoges. Un artiste accompli pour lequel l’art était avant tout "la volonté de transposition de l’émotion humaine" et peindre, "un acte d’amour". Près de 300 tableaux composent l’atelier de l’artiste auxerrois Jean Burkhalter (1895-1982).  Si les paysages – de Bourgogne, du Midi, de Vendée, du Lot, d‘Isère, du Limousin – dominent l’après-midi de cette vente, de grandes silhouettes féminines, des études pour l’église d’Oradour-sur-Glane, dédiées à saint Martin, et autres variations linéaires abstraites les accompagnent. Comptez 200 à 600 € pour les gouaches et les aquarelles, 800 à 3 000 € pour les toiles, exception faite de notre grande Maternité au bord de l’eau, pour laquelle 5 000 à 6 000 € sont demandés.
Lundi 9 novembre, salle 2 - Drouot-Richelieu.
Massol SVV.
Attribué à Martin-Guillaume Biennais, vers 1813-1814. Tabouret en "X", dit "des Maréchaux", acajou, ébène et bronze doré, 64 x 115 x 51 cm.Estimation : 120 000/150 000 €.

Sabre au clair !
De Louis XVI au second Empire, un pan de notre histoire se dévoile ce dimanche. Débutant à 10 h 30, la matinée sera notamment consacrée aux ordres de chevalerie et aux décorations, aux objets et souvenirs napoléoniens, ainsi qu’aux coiffures miniatures de Charles Sandre. Les autographes et les livres ouvriront l’après-midi, dès 14 h 15. Parmi les premiers, signalons une importante collection de près de 180 pièces, datant du Consulat et de l’Empire (20 000/25 000 €). Elle comprend notamment des documents ayant trait à Sainte-Hélène, comme le plan de la maison de Longwood et le testament manuscrit de l’empereur. Remontons le temps, avec un souvenir de Louis XVI : une clé et un ornement de serrure forgés par le roi, présentés dans un cadre en argent signé «Touron». Ils proviennent de la famille de Cléry, le valet de chambre du roi (10 000/15 000 €). Hormis la galerie de portraits affichant notamment la famille Bonaparte, le duc d’Otrante et Joachim Murat, signalons parmi les arts graphiques deux oeuvres autour de 25 000 €. L’une est une gouache de Jean-Baptiste Hilaire, peinte en 1787 et représentant une Vue de Constantinople avec la pointe du sérail depuis la rive de Galata ; l’autre, une école française du XIXe siècle, figure Charles X remettant la médaille de bronze de l’exposition de 1827 à l’ébéniste François Baudry. Le lit bateau qui y figure est actuellement conservé au musée des Arts décoratifs. Passons aux armes blanches, avec un sabre d’honneur, accompagné de sa documentation, donné par le Premier consul au chef de brigade Antoine Alexandre Rousseau pour son comportement héroïque à Furstemberg en 1796 (50 000/60 000 €). Les collectionneurs devraient aussi se passionner pour un ensemble de colonel du 4e régiment de cuirassier du premier Empire. Il se compose d’un casque à cimier avec bombe en argent et d’une cuirasse en cuivre argenté gravé. Après les batailles, ce modèle de 1804 est prêt à affronter les enchères entre 130 000 et 150 000 €. Restez à votre poste pour l’autre vedette de l’après-midi : un tabouret attribué à Martin-Guillaume Biennais. Deux paires de sabres entrecroisés forment son piètement en "X". Il est à rapprocher de deux tabourets destinés aux maréchaux devant s’asseoir près du trône de l’Empereur, aujourd’hui conservés au Musée national des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau. Sur les douze commandés à Biennais, seuls trois furent réalisés. Faites vos comptes... 120 000 à 150 000 € seront nécessaires pour acquérir notre modèle.
Fontainebleau, dimanche 8 novembre, Jean-Pierre Osenat Fontainebleau SVV. M. Dey, Mme Lamort, M. Nicolas, Cabinet Dillée, M. de Broglie, Mme Berthelot-Vinchon, M. Millet.
Julien Gustave Gagliardini (1847/1848-1927), Venise, fête religieuse à la Salute, huile sur toile, 190 x 258 cm. Estimation : 50 000/70 000 €.

Une fête imposante
L’oeuvre est d’importance à plus d’un titre. D’abord par sa provenance, puisque, achetée au Salon de 1910, elle est toujours restée dans la collection Soubise, une famille historique. Comme on le sait, l’hôtel de Soubise est l’un des plus prestigieux hôtels particuliers du Marais et appartient désormais aux Archives nationales. Ensuite, par ses dimensions exceptionnellement imposantes, encore agrandies par le cadre en bois sculpté d’origine. Son auteur, Julien Gustave Gagliardini, fait partie des nombreux petits maîtres de l’école de Marseille – bien qu’il soit né en Alsace –, et signe là une toile magistrale. L’artiste évolue entre peinture d’histoire et paysage, terminant sa carrière par la représentation des sites pittoresques du midi de la France. Ici, il réunit ses deux inspirations. Le sujet choisi, la composition de la scène et l’emploi de touches rouge carmin pour les robes des moines, tout contribue à une belle réussite picturale.
Bayeux, mercredi 11 novembre.
Bayeux Enchères SVV. Cabinet Turquin, Mme Mauduit.
Gobelet en argent et vermeil, Moscou, Michel Mokeev, 1721-1722, 296 g, h. 13 cm. Estimation : 18 000/25 000 €.

Samson en Russie
L’orfèvrerie est l’une des grandes fiertés de la Russie tsariste, mais les objets en or et en argent de l’époque de Pierre le Grand sont rarement parvenus jusqu’à nous. En effet, le grand Empire de l’Est, comme la France de Louis XIV, traverse alors une période de guerres. De plus, totalement absorbé par la construction de sa nouvelle capitale, qui engloutit une grande part des richesses, le tsar émet des oukases très stricts limitant l’usage et la fabrication d’objets précieux. Il va même jusqu’à fermer quelque temps le palais de l’Or et de l’Argent du Kremlin, principal lieu de production de l’orfèvrerie. Par son décor et ses inscriptions, ce gobelet présente un caractère historique d’importance. Samson déchirant la gueule d’un lion peut être compris comme une allégorie de la victoire définitive du "petit père des peuples" sur la Suède de Charles XII après presque vingt ans d’hostilités. La date de fabrication, 1721-1722, est un argument qui va dans ce sens, puisque 1721 marque la signature du traité de paix de Nystadt. Quant à la phrase, à traduire en français par "Vivat, vivat, vivat le tsar Piotr Alexeïevitch", elle est sans équivoque. Un verre identique est conservé au palais des Armures du Kremlin à Moscou. Décidément, il ne lui manque rien... Longue vie, donc, à ce gobelet !
Tours, lundi 9 novembre.
Hôtel des Ventes Giraudeau SVV. M. Maury et Mme Maury-Berseneff.
Travail des frères Giobbe pour Salviati, 1860. Guéridon en bois noirci, marbre et plateau en pierre d’oxydiane incrustée de verre polychrome et pâte de verre à paillettes d’or de Murano. diam. 64 cm. Estimation : 10 000/15 000 €.

Un guéridon à paillettes
Le renouveau de la verrerie vénitienne au XIXe siècle est lié à une histoire d’amour. Celui qu’Antonio Salviati, un avocat réputé, porte à la mythique cité des Doges. Décidé à faire renaître l’industrie du verre, éclipsée par les productions de Bohême et celles de la perfide Albion, il s’associe en 1859 à Lorenzo Radi et installe des ateliers dans l’île de Murano. Dynamique et volontaire, notre homme embauche les meilleurs techniciens, qui imaginent avec lui une nouvelle technique de mosaïque en verre. Moderne et intelligent, il expose ces chatoyantes créations dans un palais bordant le Grand Canal. Le succès ne se fait pas attendre. Le verre de Murano se répand jusqu’aux grandes capitales européennes, avant de partir à la conquête de l’Amérique. Les productions sortant des ateliers sont ambitieuses, à l’image de ce guéridon à la technicité parfaite, réalisé par les frères Giobbe. Le plateau en pierre d’oxydiane est incrusté de verre émaillé polychrome et de paillettes d’or : celles-ci sont obtenues par l’emprisonnement d’une fine couche de métal entre une pièce de verre coloré et une autre de verre transparent, donnant ainsi l’aspect de l’aventurine. Il aurait été bien dommage que la verrerie de Murano reste endormie. Avec Salviati, heureusement, elle a rencontré son prince charmant.
Limoges, dimanche 8 novembre.
Étude Galateau SVV.
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